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CA Paris, Pôle 5 – Chambre 2, 28 octobre 2022

L’autorité de la chose jugée jusqu’alors attachée à la transaction a été supprimée par la loi de modernisation de la justice du XXIème siècle du 18 novembre 2016. Dorénavant, l’article 2052 du Code civil prévoit que « La transaction fait obstacle à l’introduction ou à la poursuite entre les parties d’une action en justice ayant le même objet ». Néanmoins, la Cour de cassation rappelle que la transaction qui ne met fin au litige que sous réserve de son exécution, ne peut être opposée par l’une des parties que si celle-ci en a respecté les conditions.

Dans cette affaire opposant deux concurrents, titulaires des marques « DIM » d’une part et « Le Bourget » d’autre part, le premier reprochait au second d’avoir mis en œuvre une opération marketing identique à la sienne une fois celle-ci achevée pour promouvoir ses produits.

Après mise en demeure de cesser les actes reprochés, divers courriers avaient été échangés entre les parties et leurs conseils aux termes desquels, l’engagement avait été pris de cesser l’opération promotionnelle, et de retirer tous les supports mis en circulation au plus tard le 19 novembre 2017 ainsi que de modifier la PLV litigieuse, sauf le bon de réduction associé. En 2018, une nouvelle mise en demeure était envoyée portant sur le retrait du bon de réduction et de toute PLV litigieuse.

Par courrier officiel, un nouvel engagement de procéder au retrait du bon de réduction dans les différents magasins au plus tard le 31 mars 2018 était pris, ainsi que celui de stopper toute offre promotionnelle incluant un stop-rayon pour de futures collections. Le demandeur prenait acte de ces engagements et concluait que, s’il devait constater qu’au 1er avril 2018 il restait des exemplaires de la PLV litigieuse, en tout ou en partie, dans le moindre magasin, il considérerait cela comme une grave violation des engagements pris et prendrait toutes les mesures nécessaires, au besoin judiciaires, pour faire respecter ces engagements, faire cesser tout trouble, sous astreinte, et obtenir réparation pour le préjudice subi.

Considérant que les engagements n’avaient pas été respectés, le demandeur assigne son concurrent devant le tribunal de commerce, en concurrence déloyale et parasitisme.

Condamné en première instance pour actes de concurrence déloyale et parasitisme, l’appelant reprochait aux premiers juges d’avoir rejeté l’irrecevabilité à agir qu’il invoquait en raison de la transaction intervenue entre les parties. L’appelant faisait valoir qu’une transaction avait été conclue aux termes de laquelle s’il s’engageait à retirer la PLV litigieuse, et l’autre partie renonçait à agir en justice.

La cour retient la qualification de transaction, les courriers échangés comportant des concessions réciproques. Néanmoins, selon la cour, la présence des supports litigieux dans deux supermarchés postérieurement à la date du 31 mars 2018, ne constitue pas des manquements résiduels comme le soutenait l’appelant mais au contraire des manquements graves au regard des engagement pris, l’appelant ne pouvant ignorer les difficultés liées au retrait des produits initialement fixé à novembre 2017.

Sur le fond, la cour confirme le jugement en retenant l’existence d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme. Après une comparaison des deux campagnes promotionnelles, la cour retient que les deux campagnes ont en commun la même combinaison de plusieurs éléments promotionnels : i) une partie d’un stop-rayon fixé au bord de l’étagère qui a une présentation très proche, ii) une phrase quasi identique inscrite en couleur blanche « pour l’achat d’un produit » ou « pour l’achat d’un collant », iii) la présence d’une flèche blanche identique dans laquelle est inscrite la mention « servez-vous » renvoyant à des bons de réduction en libre-service accrochés à côté du stop-rayon, iv) une réduction identique de 1,50 euros et v) la représentation sur le stop rayon d’un mannequin portant un collant et un soutien-gorge noir dans une position cambrée les bras levés. La motivation de la cour pour retenir des actes de concurrence déloyale fautifs est usuelle en la matière, et rappelle que si la plupart des éléments figurant dans chacune des PLV apparaissent, pris isolément, usuels en matière de promotion de produits de consommation courante commercialisés notamment par la grande distribution, il n’en demeure pas moins que leur combinaison à l’identique, qu’il s’agisse de la présentation, des couleurs ou des messages, est susceptible d’engendrer un risque de confusion entre les produits en cause dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne et normalement informé, ce d’autant que les deux campagnes publicitaires ont été initiées à quelques mois d’intervalle. Les quelques différences (position du mannequin) ne sont pas de nature à écarter les ressemblances relevées.

Des agissements parasitaires sont également caractérisés par le fait d’avoir profité, sans bourse délier, des investissements de la société concurrente qui a justifié des frais de création, de fabrication et de mise en place de sa campagne publicitaire.

Il convient dès lors d’être très vigilant lors de la rédaction d’un accord transactionnel, sur les engagements pris notamment quant à leur faisabilité en termes de délai et sur les conséquences d’un non-respect.

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