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CA Paris, Pôle 5 Ch. 1, 26 octobre 2011

Enregistrer une marque pour des boissons alcoolisées nécessite le respect des dispositions du Code de la santé publique. Ces dernières encadrent la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques. L’article L 3323-3 du Code de la santé publique dispose en effet « qu’est considérée comme propagande ou publicité indirecte la propagande ou publicité en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article autre qu’une boisson alcoolique qui, par son graphisme, sa présentation, l’utilisation d’une dénomination, d’une marque, d’un emblème publicitaire ou d’un autre signe distinctif, rappelle une boisson alcoolique ».

La Cour d’Appel de Paris, par un arrêt du 26 octobre 2011, a eu l’occasion de se prononcer sur la question du dépôt à titre de marque pour des boissons alcooliques d’un signe identique à une marque déposée antérieurement pour des produits de consommation courante. La Cour, infirmant le jugement de première instance sur ce point (Tgi Paris, 3e ch. 4e sect. 29 oct. 2009, RG 09/01493) [Voir article Netcom Février 2010] considère que ce dépôt aurait pour conséquence de paralyser l’usage de la marque première dès lors que la société ne peut plus exercer pleinement son droit de propriété sur son signe.

En l’espèce, l’affaire portée devant la Cour d’Appel opposait la société Diptyque titulaire de la marque « Diptyque » et ayant pour activité la fabrication de bougies parfumées et d’eaux de toilette, à la société Jas Hennessy & Co. La société Diptyque ayant appris le dépôt à titre de marque du signe « Diptyque » par la société Jas Hennessy & Co pour désigner des boissons alcooliques, demanda l’annulation de cette marque dans la mesure où celle-ci lui interdirait toute publicité ou propagande pour ses propres produits (bougies…) en raison de l’article L 3323-3 du Code de la santé publique. La Cour fait droit à l’argumentation de la demanderesse en affirmant tout d’abord que la société Jas Hennesy & Co n’est pas fondée à soutenir qu’une publicité pour des bougies ou parfums ne pourrait jamais être regardée comme « rappelant » une boisson alcoolique, au sens des dispositions du Code de la santé publique. Elle précise que l’application de ces dispositions nécessite une appréciation concrète et un examen singulier d’une publicité ou propagande en particulier. La Cour d’Appel considère en outre que le dépôt du signe « Diptyque » par la société Jas Hennessy & Co est de nature à paralyser l’usage que la société Diptyque fait de sa marque dès lors qu’elle ne peut plus exercer pleinement son droit de propriété sur le signe en question. Il en résulte ainsi une perte d’efficacité de la marque déposée antérieurement qui s’avère constitutive d’une atteinte aux droits de la marque. La Cour décide donc l’annulation de la marque seconde « Diptyque » désignant des boissons alcooliques.

Par cet arrêt la Cour infirme la position des juges de première instance qui avaient considéré, à l’inverse, que l’usage fait de la marque première, sa présentation ainsi que les circuits de distribution étaient distincts, ce qui conduisait à exclure tout risque de publicité indirecte pour des boissons alcooliques.

En infirmant cette décision et en reprenant l’argumentaire de la Cour de Cassation de 2006 (Commerciale, 19 décembre 2006, n°04-14.420), la Cour d’Appel semble fixer la position de la jurisprudence : le fait de déposer à titre de marque pour des boissons alcooliques, un signe identique à une marque déposée antérieurement pour des produits de consommation courante, a pour effet de paralyser l’usage de la marque première et constitue donc une atteinte aux droits de cette marque eu égard aux dispositions du Code de la santé publique.

Marion DUBOIS

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