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Cass. Civ. 1ère, 11 septembre 2013, N° 12-17.794 à N°12-17.799

La cour de cassation a jugé que le consentement donné par des musiciens pour l’utilisation de leur prestation pour des « phonogrammes du commerce » comprend la mise à disposition du public par téléchargement payant.

En 2006, la SPEDIDAM avait engagé des actions contre les six principaux services de musique en ligne, évoquant plus de 250 chansons françaises des années soixante à quatre vingt dix, en soutenant que les musiciens qui avaient participé aux enregistrements avaient donné leur autorisation pour l’exploitation de « phonogrammes du commerce », cette notion ne s’appliquant qu’à des supports physiques.

Ces actions avaient été introduites pendant les débats sur la loi HADOPI et avaient fait l’objet d’une communication soutenue, la SPEDIDAM ayant fait le choix de soutenir le principe de la « licence globale» plutôt que de s’attaquer au téléchargement illicite. En l’espèce, la SPEDIDAM tentait de démontrer que la mise à disposition par les producteurs, développée pour constituer une alternative aux offres illicites, n’était elle-même pas licite.

Selon la SPEDIDAM, l’autorisation donnée par les musiciens ne s’étendait pas à la mise à disposition par téléchargement car ce type d’exploitation implique, du fait de sa dématérialisation, un changement de destination et constituait donc une exploitation secondaire requérant une autorisation distincte.

La SPEDIDAM invoquait au soutien de cette interprétation la convention de Rome qui définit la publication comme la mise à disposition de copies du phonogramme au public en quantité suffisante. Elle évoquait également les directives européennes qui distinguent le droit de distribution et le droit de communication des phonogrammes.

Comme le tribunal, la cour d’appel avait jugé que le phonogramme est la fixation d’une séquence de sons et que sa nature n’est pas modifiée par la dématérialisation, pas plus que sa destination qui est d’être écoutée par celui qui en fait l’acquisition.

Elle en avait déduit que la mise à disposition du public par voie de téléchargement constitue une mise disposition du public à des fins de commerce, au même titre que la distribution de supports physiques, le phonogramme ne se confondant pas avec « l’objet tangible » mis à la disposition du public dans les bacs des disquaires.

La Cour de cassation a jugé que « la Cour d’appel qui a exactement retenu que la qualification juridique de phonogrammes était indépendante de l’existence ou non d’un support tangible, en a déduit que les autorisations litigieuses données par les artistes/interprètes incluaient la mise en disposition du public par voie de téléchargement payant, justifiant ainsi légalement sa décision ».

La Cour de cassation a donc jugé que la qualification légale de phonogramme est indépendante de l’existence d’un support tangible. En conséquence, la Cour d’appel était fondée à analyser le consentement donné par les musiciens et décider que, conformément aux usages de l’industrie et aux accords collectifs en vigueur, les autorisations données par les musiciens pour l’exploitation de leur prestation enregistrée sur un phonogramme du commerce comportaient la communication au public par voie de téléchargement payant.

A cette occasion, la Cour de cassation a également confirmé que la SPEDIDAM n’était pas fondée à prétendre agir au nom de la collectivité des musiciens. Elle a ainsi décidé que :

– La cour d’appel a retenu à bon droit que la SPEDIDAM était irrecevable à agir pour la défense des intérêts individuels des artistes/interprètes à l’égard desquels elle ne justifie ni d’une adhésion ni d’un mandat ;
– Une créance de réparation, élément de l’actif successoral transmis ensuite aux ayants cause de l’artiste décédé, ne peut être invoquée en justice que par eux, sauf à ce qu’ils aient donné à un tiers mandat d’y procéder ; implicitement, la Cour qualifie l’apport à la SPEDIDAM de mandat prenant fin par le décès du mandant, et non pas de cession.

Si ces six décisions mettent fin aux discussions sur l’étendue des consentements donnés par les musiciens lors de l’enregistrement de leur prestation, il ne fait pas de doute que la question des conditions de cette exploitation en ligne continuera d’être débattue.

Le débat s’est aujourd’hui déplacé vers la question de la rémunération et du partage de la valeur sur Internet ; à la suite du rapport Lescure, le Ministère de la culture a désigné un rapporteur et il ne fait pas de doute que la question fera l’objet de discussions sérieuses avant la présentation des projets de loi qui sont annoncés pour 2014.

Eric LAUVAUX

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