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Cass. Com, 20 novembre 2012, n°12-11753

La confirmation sans ambiguïté, par la Cour de Cassation, de l’application des dispositions du Code de la santé publique aux marques, introduit une nouvelle donnée en matière de recherche d’antériorités.

L’article L.3323-3 du Code de la santé publique définit la propagande ou la publicité, directe ou indirecte en faveur des boissons alcooliques comme étant : « la propagande ou publicité en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article autre qu’une boisson alcoolique qui, par son graphisme, sa présentation, l’utilisation d’une dénomination, d’une marque, d’un emblème publicitaire ou d’un autre signe distinctif, rappelle une boisson alcoolique ».

Se fondant sur ces dispositions, la société Diptyque, ayant pour activité la fabrication de bougies parfumées et d’eaux de toilette sous la marque « Diptyque » demandait l’annulation de la marque éponyme déposée par la société Jas Hennessy & Co pour désigner des boissons alcooliques.

En première instance, les juges du fond rejetèrent la demande d’annulation en relevant qu’il ne pouvait être déduit des dispositions du Code de la santé publique que l’enregistrement antérieur d’un signe à titre de marque pour des produits de consommation courante le rendait indisponible pour les boissons alcooliques au seul motif que l’usage de ce premier signe serait susceptible de contrevenir aux dispositions dudit code [Voir Article Netcom Février 2010].

Ce jugement avait ainsi adopté une position contraire à un arrêt de la Cour de cassation rendu en matière de produits du tabac (Cass. Com. 19 décembre 2006, Société Bat c/ Belvédère, s’agissant de la marque « Sobiesky »).

En appel, les juges infirment le jugement et considèrent que le dépôt de la marque seconde identique pour les boissons alcooliques aurait pour conséquence de paralyser l’usage de la marque première dès lors que la société ne peut plus exercer pleinement son droit de propriété sur son signe [Voir Netcom Décembre 2011].

La société Jas Hennessy & Co se pourvoit en cassation en faisant notamment valoir le principe de spécialité des marques en vertu duquel une marque bénéficie de la protection pour les produits identiques à ceux visés au dépôt ou pour les produits similaires s’il en résulte un risque de confusion. La société Jas Hennessy & Co soutenait également l’absence d’interdiction totale de publicité résultant des dispositions du Code de la santé publique de telle sorte que la société Diptyque n’était nullement privée de son droit de poursuivre la publicité de ses produits.

La Cour rejette ces arguments et juge que le dépôt de la marque seconde identique et la commercialisation de boissons sous cette marque créent une entrave à la libre utilisation de la marque première dès lors que selon l’article L.3323-3 du Code de la santé publique, est considérée comme publicité indirecte en faveur d’une boisson alcoolique, la publicité effectuée au profit d’un autre produit qui par l’utilisation d’une marque rappelle cette boisson.

Ainsi, le fait de déposer à titre de marque, pour des boissons alcooliques, un signe identique à une marque déposée antérieurement pour des produits de consommation courante a pour effet de paralyser l’usage de la marque première et constitue donc une atteinte aux droits de cette marque eu égard aux dispositions du Code de la santé publique

En vertu des dispositions du Code de la santé publique, et contrairement au principe de spécialité du droit des marques, le titulaire d’une marque peut donc obtenir l’annulation d’une marque identique postérieure au seul motif qu’elle désigne des produits alcooliques ou du tabac.

De la même manière, un déposant sera bien avisé d’intégrer dans sa recherche d’antériorités les boissons alcooliques ou les produits du tabac et vérifier que le signe envisagé n’est pas d’ores et déjà déposé pour désigner ces produits couverts par des dispositions particulières.

Florence DAUVERGNE

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