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Ord. n°2021-1518 du 24 novembre 2021 complétant la transposition de la directive 2019/790 du Parlement et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/6/CE et 2001/29/CE.

Le 23 février 2022, un projet de loi de ratification de l’ordonnance n°2021-1518 du 24 novembre 2021 a été enregistré auprès de la présidence du Sénat.

Cette ratification devait achever la transposition française de la directive européenne 2019/790 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique (« Danum »), dont le délai de transposition était fixé au 7 juin 2021.

Cette ordonnance consacre notamment des nouvelles exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins, un système de licence collective visant à élargir l’accès aux œuvres indisponibles ainsi qu’un mécanisme de licence collective étendue pour l’exploitation de certaines œuvres.

  • Exception à des fins d’illustration dans le cadre de l’enseignement et de la formation professionnelle (articles L.122-5 12° et L. 122-5-4 du CPI) :

L’auteur ne peut interdire la représentation ou la reproduction d’extraits d’œuvres à des fins exclusives d’illustration dans le cadre de l’enseignement et de la formation professionnelle, et ce à condition que cette utilisation respecte le régime particulier détaillé par l’article L.122-5-4 du CPI.

Cette exception s’étend à l’apprentissage et à l’élaboration et diffusion de sujets d’examen organisés dans le prolongement des enseignements. Elle suppose une utilisation à but non commercial, les activités à but récréatives étant expressément exclues.

La représentation ou reproduction sera effectuée sous la responsabilité d’un établissement d’enseignement, soit dans ses locaux ou un autre lieu, et en présence d’un public composé majoritairement d’élèves ou d’étudiants ou bien au sein « d’un environnement numérique sécurisé accessible uniquement aux élèves, étudiants et personnel de l’établissement. ».

Il est également précisé que ces utilisations feront l’objet d’une compensation, l’article précisant qu’une rémunération « négociée sur une base forfaitaire » devra être versée à l’auteur.

Des licences permettant aux établissements concernés d’utiliser les œuvres pourront être octroyées. Elles devront prévoir une rémunération « raisonnable » des auteurs. Sur arrêté du ministère de la culture, ces licences pourront être étendues aux titulaires de droits non-membres d’un organisme de gestion collective agréé.

  • Exception en vue de la fouille de textes et de données ou « data mining » (articles L.122-5 10° et L.122-5-3 du CPI) :

La fouille de textes et de données est définie par l’article L.122-5-3 comme « une technique d’analyse automatisée de textes et données sous forme numérique afin d’en dégager des informations notamment des constantes, des tendances et des corrélations ».

Lorsque ces données contiennent des extraits d’œuvres protégées par le droit d’auteur, leur reproduction rentrera désormais dans le champ de l’exception visée à l’article L.122-5 10° si la fouille de données a été réalisée :

  • à des fins de recherche scientifique par les organismes de recherche, les bibliothèques accessibles au public, les musées, les services d’archives ou les institutions dépositaires du patrimoine cinématographique, audiovisuel ou sonore, ou pour leur compte et à leur demande par d’autres personnes, y compris dans le cadre d’un partenariat sans but lucratif avec des acteurs privés.
  • quelle que soit la finalité de la fouille, par toute personne à moins que l’auteur s’y soit opposé « par des procédés lisibles par machine ». (Sur la notion de « procédés lisibles par machines », il est possible de se référer au rapport du CSPLA et à ses annexes sur la transposition des exceptions de fouille de textes et de données).

Les copies ou reproductions numériques doivent être stockées avec un niveau de sécurité approprié et être détruites une fois que l’opération de fouille de données est terminée.

  • Œuvres indisponibles (L.122-5 13°, L.122-5-5 et L.138-1 et suivants du CPI) :

L’œuvre indisponible est définie comme « une œuvre protégée dont on peut présumer de bonne foi, au terme d’efforts raisonnables d’investigation , qu’elle n’est pas disponible pour le public par le biais des circuits de distribution commerciaux habituels et dont la première publication ou communication au public remonte à trente ans ou plus. ».

Afin de permettre une diffusion et un accès plus large aux œuvres indisponibles, un système de licences concédées par des organismes de gestion collective agréés est instauré permettant aux bibliothèques, musées , archives et institutions dépositaires du patrimoine cinématographique, audiovisuel ou sonore de procéder à la numérisation des œuvres et à leur diffusion.

En conséquence, l’auteur ne peut interdire la reproduction et la représentation d’une œuvre indisponible (L.122-5 13°). Les modalités d’application de cette nouvelle exception sont précisées à l’article L.122-5-5 du CPI.

Ainsi, les bibliothèques, musées, archives et les institutions dépositaires du patrimoine cinématographique, audiovisuel ou sonore pourront reproduire et représenter une œuvre indisponible sans autorisation de son auteur exclusivement dans le but de rendre l’œuvre disponible sur un service de communication au public en ligne à visée non commerciale. Il est aussi précisé que le nom de l’auteur devra être indiqué.

Six mois avant la mise à disposition effective de l’œuvre, l’organisme de gestion collective transmet à l’Office Européen de la propriété intellectuelle les informations permettant l’identification de l’œuvre et les modalités permettant à l’auteur ou à ses ayants droit de s’opposer à cette exploitation. Ces informations sont publiées sur une plateforme en ligne accessible au public.

Si un titulaire exerce son droit d’opposition, l’exploitation devra cesser au plus tard dans les trois mois suivant cette notification (L.134-8 du CPI).

  • Licences collectives étendues (L.324-8-1 à L.324-8-6 du CPI) : Lorsqu’un organisme de gestion collective a conclu une licence pour l’exploitation d’œuvres, cet accord pourra être étendu aux titulaires non-membres de l’organisme de gestion collective à condition que l’organisme de gestion collective ait été préalablement agréé par le ministre chargé de la culture.

L’agrément sera délivré en considération de la représentativité de l’organisme, de la qualification professionnelle de ses dirigeants, des moyens humains et matériels proposés pour assurer la gestion des œuvres et de l’égalité de traitement dans la répartition des sommes entre les titulaires de droits.

Le mécanisme des licences collectives étendues accordant un pouvoir important aux organismes de gestion collective, la directive Danum a confié aux Etats-membres le soin de définir le périmètre au sein duquel de telles licences peuvent être concédées.

Ainsi, en droit français, le recours à une licence collective étendue n’est possible que :

  • Pour autoriser les établissements d’enseignement à exploiter des œuvres sous forme numérique à des fins d’illustration dans le cadre de l’enseignement (L.122-5-4 du CPI) ;
  • Pour autoriser l’exploitation d’œuvres des arts visuels par des plateformes de partage de contenus et dans le cadre de travaux scientifiques diffusés en ligne sans restriction d’accès (L.137-2-1 et L. 139-1 du CPI);
  • Pour l’exploitation numérique des livres indisponibles (L.134-3 du CPI).

Les titulaires non-membres peuvent s’opposer à tout moment à ce qu’un organisme de gestion collective puisse concéder pour son compte des autorisations d’exploitation. L’exploitation doit cesser au plus tard dans les trois mois suivant la notification de son opposition à l’organisme de gestion collective.

Un décret en Conseil d’Etat viendra préciser les modalités d’exercice du droit d’opposition des titulaires, ainsi que la procédure d’agrément des organismes de gestion collective.

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