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Dans deux décisions du 13 septembre 2023, la Cour de Cassation a procédé à un retentissant revirement de jurisprudence (Cass. soc., 13 sept. 2023, 22-17340 ; Cass. soc., 13 sept. 2023, 22-17638). Désormais, les salariés en arrêt de travail pour maladie, d’origine professionnelle ou non, acquerront des congés payés pendant toute la durée de leur arrêt.

Ce nouveau principe, annoncé à grand renfort de communiqué et notice de la haute juridiction, est révolutionnaire en droit du travail français. Il était attendu en raison de la jurisprudence de la CJUE ; il est à présent effectif.

Pour mémoire, le code du travail dispose que « Le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur » (art. L3141-3 c. trav.). A contrario, un salarié qui n’effectue pas de travail effectif n’acquiert pas de congés payés d’après la loi française. Cependant, le code du travail précise que sont notamment considérées « comme période de travail effectif » « Les périodes, dans la limite d’une durée ininterrompue d’un an, pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle » (art. L3141-5 5° c. trav.).

Subséquemment, avant le revirement de jurisprudence ici commenté, la Cour de cassation jugeait que :

  • les arrêts de travail pour maladie non professionnelle ne pouvaient être intégrés dans le calcul de la durée des congés payés (notamment Cass. soc., 10 déc. 2014, 13-17743) ;
  • un salarié absent en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ne pouvait acquérir de congés payés au-delà d’un an d’arrêt (notamment Cass. soc., 2 juin 2016, 15-11422).

Dans les deux décisions du 13 septembre 2013, la haute juridiction rappelle l’état de la jurisprudence de la CJUE, en vertu de laquelle le droit européen « n’opère aucune distinction entre les travailleurs qui sont absents du travail en vertu d’un congé de maladie (…) et ceux qui ont effectivement travaillé au cours de ladite période » et le droit au congé annuel payé « ne peut être subordonné par un Etat membre à l’obligation d’avoir effectivement travaillé pendant la période de référence établie par ledit Etat ».

Après avoir également rappelé que « Le droit au congé annuel payé constitue un principe essentiel du droit social de l’Union », la Cour de cassation constate que le droit français n’est, objectivement, pas conforme au droit de l’Union. Aussi, pour garantir son plein effet dans le respect de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, la haute juridiction assume « d’écarter » l’application des dispositions du droit français qui ne permettent pas une interprétation conforme au droit de l’Union. En effet, dans ces circonstances, la CJUE juge que « la juridiction nationale doit laisser ladite réglementation nationale [celle non-conforme au droit de l’Union] inappliquée ».

Désormais, en droit du travail français, indépendamment des dispositions légales susmentionnées :

  • un salarié acquiert des droits à congé payé pendant la suspension de son contrat de travail pour cause de maladie non professionnelle (Cass. soc., 13 sept. 2023, 22-17340) ;
  • un salarié dont le contrat de travail est suspendu pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle acquiert, à cette occasion, des congés payés, y compris au-delà d’une durée ininterrompue d’un an (Cass. soc., 13 sept. 2023, 22-17638).
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