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TGI de Paris, 3ème Ch., 3ème section, 10 mars 2017

Par ce jugement, le Tribunal a condamné une communauté d’agglomération pour avoir violé le droit moral d’un artiste-sculpteur du fait des dégradations survenues sur son œuvre.

Ce sculpteur était l’auteur d’une œuvre installée sur la place d’une commune, composée de cinq éléments : une fontaine, une sculpture horizontale, deux obliques en acier, et une sculpture centrale.

Trois des éléments ayant été enlevés, l’artiste a assigné la communauté d’agglomération et la commune, estimant que seule l’une d’elle avait pu être à l’initiative de ce qu’il considérait être une dégradation et une dénaturation de son œuvre « eu égard à l’emplacement, la nature, la dimension et au poids des éléments affectés », et que l’atteinte à son droit moral se trouvait ainsi constituée.

L’artiste demandait notamment au Tribunal qu’il ordonne à la commune et la communauté d’agglomération la remise en place des éléments disparus et dénaturés de son œuvre, et à défaut leur condamnation au paiement de la somme de 100.000 euros, en réparation de son préjudice.

Dans son jugement, le Tribunal ordonne tout d’abord la mise hors de cause de la commune, celle-ci n’étant pas propriétaire de l’œuvre, qui appartient à la communauté d’agglomération.

S’agissant de la demande de l’artiste tendant à la remise en état de son œuvre, le Tribunal retient qu’il n’est pas compétent pour l’examiner. En effet, si l’article L331-1 du Code de la propriété intellectuelle donne compétence exclusive à certains tribunaux de grande instance pour juger des actions et demandes relatives à la propriété littéraire et artistique, les demandes visant à faire injonction à l’administration de réaliser des travaux sur un ouvrage public ne peuvent, conformément à une décision récente rendue par le tribunal des conflits (T. confl., 5 septembre 2016, n°4069, Nouvel / Assoc. Philharmonie de Paris), être prononcées que par une juridiction administrative.

Enfin, sur l’atteinte au droit moral invoquée par l’artiste, le Tribunal condamne la communauté d’agglomération, estimant que celle-ci ne justifiait pas avoir pris « toute disposition (…) pour éviter les dégradations de l’œuvre ». Dès lors, selon le Tribunal, le fait que ces dégradations aient été commises par des tiers ne permet pas à la communauté d’agglomération de s’exonérer de sa responsabilité sur les œuvres dont elle est propriétaire en cas d’atteinte au droit moral de l’auteur.

Cette décision apparaît particulièrement sévère puisqu’il n’était pas contesté que les dégradations, à l’origine de l’atteinte au droit au moral, étaient le fait d’un tiers.

Les propriétaires d’œuvres, et à plus forte raison les communes, communautés d’agglomération, et musées (qui exposent généralement les œuvres dans des lieux accessibles du public) peuvent légitimement s’inquiéter de cette décision qui étend leur responsabilité à la prévention des dégradations …

Antoine JACQUEMART

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