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Cour de Cassation, Chambre Commerciale, 7 octobre 2014, pourvoi n° 13-17839

La question de la fixation, en cas de contestation, du prix de cession de parts ou d’actions par un expert judiciaire s’était focalisée sur la liberté de cet expert quant à la détermination de la valeur de ces parts ou actions (article 1843-4 du Code civil).

Une ordonnance du 31 juillet 2014 avait en partie réglé cette question dans le cas où les statuts d’une société prévoient la cession des droits sociaux d’un associé ou le rachat de ces droits par la société et lorsque la valeur des parts ou actions cédés n’était ni déterminé ni déterminable. Cette ordonnance avait modifié l’article 1843-4 du Code civil pour imposer à l’expert judiciaire le respect des règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts de la société ou par toute convention liant les parties.

A l’occasion d’un arrêt de la Cour de cassation du 7 octobre 2014, la question resurgit néanmoins, non plus sous l’angle de la fixation du prix de cession par un expert mais par le juge.

Les faits ayant donné lieu à cet arrêt sont les suivants :

Deux époux avaient cédé à la société A Plus Santé la totalité des actions qu’ils détenaient dans le capital de la société Maison de retraite de l’Echeneau. Le prix de cession, fixé à 1 268 290 € sur le fondement des comptes de la Maison de retraite de l’Echeneau au 31 décembre 2005, était à parfaire sur la base d’une clause de révision de prix en fonction d’une situation nette comptable au 28 février 2007 dont le contrat de cession avait confié l’établissement à l’expert-comptable commun des parties.

La situation nette comptable établie par cet expert-comptable faisait ressortir un supplément de prix de 116 986,48 €, ce que contestait la société A Plus Santé.

Les deux époux saisissaient le tribunal de commerce de Fréjus pour qu’il nomme un expert chargé de fixer le prix définitif de cession, ce dernier le fixant à 1 172 759 €, soit un prix inférieur de 95 531 € au prix initial. La société A Plus Santé saisissait le Tribunal de commerce de Poitiers pour faire condamner les deux époux au reversement du trop versé et au paiement de diverses sommes au titre de la garantie de passif.

Le 23 janvier 2012, le Tribunal de commerce de Poitiers confirmait le prix de cession définitif fixé par l’expert judiciaire à 1 172 759 € et rejetait les autres demandes de A Plus Santé.

La société A Plus Santé faisait appel de ce jugement devant la Cour d’Appel de Poitiers. Celle-ci infirmait le jugement et réduisait de 95 531 € à 51 706 € le montant du prix à restituer par les époux à A Plus Santé, se reconnaissant ainsi le droit de fixer le prix définitif sans se considérer lié par le prix fixé par l’expert judiciaire au motif que le litige entre les parties qui lui était soumis ne concernait pas le la fixation du prix de cession mais les modalité d’évaluation de la clause de révisions de prix.

La Cour d’Appel écartait au passage l’application de l’article 1843-4 du Code civil qui ne concernait que la détermination de la valeur des parts ou actions.

Cette analyse est pleinement approuvée par la Cour de cassation. Elle énonce en effet que la Cour d’Appel « a exactement retenu qu’il lui appartenait de déterminer le prix définitif de cession des actions sans être liée par les conclusions de l’expert judiciaire qui avait été désigné et dont l’ évaluation pouvait être écarté même en l’absence d’erreur grossière ».

Cette jurisprudence permet donc au juge de fixer un prix de cession de parts ou d’actions, dès lors que celui-ci est au moins déterminable. Elle est susceptible de s’appliquer non seulement aux contrats de cession de parts ou d’actions mais également aux conventions extra statuaires tels que les pactes d’actionnaires ou les promesses de cession ou d’achats de titres.

Laurent THOMAS

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