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Sur recours contre la décision de l’Autorité de la concurrence du 9 décembre 2021, sanctionnant une pratique d’obstruction commise par la SAS Mayotte Channel Gateway, la Cour d’appel de Paris a confirmé en tous points la décision de l’Autorité (CA Paris, 21 décembre 2023, n° 22/00474).

Cet arrêt revêt une importance particulière quant à la notion d’influence déterminante dans le calcul de l’amende et l’imputabilité des pratiques commises par une entreprise à sa société-mère.

L’affaire découlait du refus délibéré de répondre à une demande d’informations faite par les services d’instruction auprès de la SAS Mayotte Channel Gateway, et ce malgré trois relances et l’envoi d’un rapport d’obstruction par l’Autorité.

L’auteure des pratiques d’obstruction contestait l’application par l’Autorité de la présomption d’influence déterminante à l’encontre de sa société-mère du fait de la détention de 90 % de son capital.

La Cour d’appel confirme l’application de cette présomption, en retenant que :  

Premièrement, ni la jurisprudence interne, ni celle de l’Union n’a fixé de seuil ou de fourchette de niveau de détention du capital permettant d’appliquer à la société mère la présomption d’influence déterminante sur sa filiale.

Deuxièmement, « ce n’est pas la simple détention de la totalité ou de la quasi-totalité du capital de la filiale, en elle-même, qui fonde la présomption de l’exercice effectif d’une influence déterminante, mais le degré de contrôle de la société mère sur sa filiale que cette détention implique. ».

L’exercice ne consisterait pas simplement à constater une détention en quasi-totalité du capital, mais à relever que la participation dans ce capital est « d’un niveau tel » qu’elle est de nature à conférer à la société-mère un degré de contrôle excluant l’autonomie de sa filiale sur le marché[1].

La nuance est faible, mais d’importance, puisque qu’elle amène la Cour d’appel de Paris à confirmer que la détention par la société mahoraise de 90 % du capital de sa filiale implique un degré de contrôle qui permet de présumer qu’elle détermine la stratégie économique et commerciale de sa filiale.

La Cour d’appel rappelle également que c’est à l’entreprise concernée de renverser la présomption ; et constate qu’au cas présent l’entreprise « n’invoque ni ne produit d’élément permettant de remettre en cause cette présomption d’exercice d’influence déterminante, que l’Autorité lui a donc appliquée à juste titre ».

En outre, il est intéressant de noter que la société mahoraise, opérant dans le domaine des services portuaires, expliquait ultérieurement son défaut de réponse aux services d’instructions en invoquant le contexte sanitaire ainsi que diverses causes extérieures selon elle, telles qu’une panne de disque dur et une inondation.

En réaction, la Cour d’appel de Paris a saisi cette occasion pour dégager un devoir général incombant à chaque entreprise de « veiller à la bonne conservation des éléments susceptibles de retracer la licéité de ses pratiques ».


[1] C’est seulement la seconde fois à notre connaissance que la Cour d’appel recourt à cette formulation aux fins de confirmer la décision de l’Autorité. La première fois avait eu lieu dans l’affaire du cartel des compotes, où une participation capitalistique allant de 91,83 % à 92,47 % pendant la période d’infraction avait été confirmée par la Cour d’appel (CA Paris, 6 octobre 2022, n° 20/014947, sur recours contre la décision n° 19-D-24 du 17 décembre 2019).

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