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CA Poitiers, 12 janv. 2023, n°21/02394

Un comédien, engagé sous contrats à durée déterminée d’usage successifs, a interprété pendant sept saisons, à raison de deux mois par an, un personnage dans un jeu télévisé. Après que son contrat n’ait pas été renouvelé pour une nouvelle saison, le comédien a assigné son employeur producteur du jeu afin d’obtenir la requalification de ses CDDU en contrat de travail à durée indéterminée ainsi que des indemnités pour licenciement abusif et inexactitudes des heures de nuit.

Le principal intérêt de cet arrêt porte sur la demande de requalification des contrats de travail formée par le comédien.

Il sera d’abord rappelé que l’article L1242-2 du Code du travail autorise les employeurs à recourir à des contrats à durée déterminée d’usage (CDDU). Pour cela, trois conditions cumulatives doivent être remplies tenant (i) au secteur d’activité – l’audiovisuel faisant partie des activités visées par décret – (ii) à la preuve par l’employeur de l’existence d’un usage de secteur de ne pas recourir à un CDI et, enfin, (iii) à la démonstration par l’employeur que le recours à des CDDU successifs est justifié par des éléments concrets établissant le caractère temporaire par nature de l’emploi.

En l’espèce, la Cour d’appel avait à se prononcer sur ce troisième critère, après que le Conseil de prud’hommes ait rejeté la demande de requalification de l’ancien employé.

Le comédien estimait que son emploi était permanent en raison d’une préparation physique qui aurait été exigée en dehors du tournage et de ses heures de travail pour l’interprétation de son personnage dans le jeu. L’employeur soutenait quant à lui que les contrats étaient légitimes notamment car le personnage interprété par le comédien était précaire et que son existence, ainsi que celle du programme, dépendaient de l’aléa de l’audience.

La Cour d’appel juge que l’emploi du comédien sous CDDU successifs était légitime. La Cour se fonde sur le fait que la continuité de l’émission et la présence du personnage dans l’émission étaient soumises aux audiences et que l’employeur-producteur pouvait avoir à renouveler le contenu pour rester attractif pour les téléspectateurs. La Cour rejette ainsi les arguments du comédien sur sa préparation physique hors périodes d’engagement et rappelle qu’au contraire il s’était engagé dans d’autres activités telles que la gestion d’un magasin de produits nutritionnels, le coaching et le culturisme. La Cour conclut que l’emploi du comédien reposait donc sur deux aléas tenant à la poursuite de l’émission et au maintien de son personnage par le producteur, qui eux-mêmes étaient soumis aux impératifs de l’audimat ; ces aléas caractérisant la nature temporaire de l’emploi et justifiant le recours à des CDDU successifs.

Le contentieux de la requalification en CDI fait l’objet d’une attention particulière pour le secteur de l’audiovisuel. Le présent arrêt confirme l’analyse rigoureuse des juges du caractère temporaire, ou non, de l’activité d’un employé engagé en CDDU. Cette même rigueur a pu à l’inverse conduire les juges à prononcer la requalification dans plusieurs décisions après avoir analysé le caractère plus ou moins permanent d’une fonction exercée par un employé dans le cadre des activités de l’employeur producteur.

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