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Cass. Soc. 6 janvier 2016, 15-10975

Dans cette affaire un syndicat demandait, pour vérifier l’effectif de l’entreprise qui organisait les élections professionnelles, et pour vérifier la régularité des listes électorales, la communication de documents que doit obligatoirement établir l’employeur, à savoir le registre unique du personnel, et les DADS des trois dernières années.

L’employeur avait refusé, arguant que le Code du travail ne prévoit pas d’accès des délégués syndicaux au registre du personnel (l’article L1221-15 du Code du travail prévoit qu’il est tenu à la disposition des délégués du personnel et des agents de contrôle c’est-à-dire l’inspection du travail), et que la DADS comporte des informations confidentielles, notamment la rémunération perçue par chaque salarié. Il avait remis aux syndicats une attestation de son expert-comptable, commissaire aux comptes, certifiant que l’effectif de 50 salariés sur 12 mois au cours des trois dernières années n’avait pas été atteint.

Le Tribunal d’instance avait considéré que cela était suffisant et avait débouté les syndicats de leur demande de communication du registre du personnel et de la DADS.

La décision a été cassée par la Cour de cassation qui a posé en principe que :

« L’employeur, tenu dans le cadre de la négociation préélectorale à une obligation de loyauté, doit fournir aux syndicats participant à cette négociation, et sur leur demande, les éléments nécessaires au contrôle de l’effectif de l’entreprise et de la régularité des listes électorales ; que pour satisfaire à cette obligation l’employeur peut, soit mettre à disposition des syndicats qui demandent à en prendre connaissance le registre unique du personnel et des déclarations annuelles des données sociales des années concernées dans des conditions permettant l’exercice effectif de leur consultation, soit communiquer à ces mêmes syndicats des copies ou extraits desdits documents, expurgés des éléments confidentiels, notamment relatifs à la rémunération des salariés ».

Les syndicats avaient en effet argué, entre autres, que l’attestation de l’expert-comptable ne suffisait pas, puisque l’attestation portait sur l’effectif global, aussi la remise des documents demandés était nécessaire afin de contrôler les effectifs catégoriels et identifier et organiser les votes par collèges.

La solution apportée par la Cour de cassation est pragmatique. Elle oblige l’employeur à fournir des données brutes et suffisamment complètes pour que les négociateurs du protocole pré-électoral aient tous les éléments nécessaires pour négocier.

Il faut cependant garder à l’esprit que le protocole pré-électoral n’est pas nécessairement négocié avec des salariés de l’entreprise. Il peut être négocié par des représentants d’organisations syndicales extérieures, qui n’appartiennent pas au personnel de l’entreprise. C’était d’ailleurs vraisemblablement le cas dans l’affaire que nous commentons, puisque la société affirmait, par son expert-comptable, qu’elle n’avait pas un effectif de 50 personnes. Elle n’avait donc sans doute pas de délégués syndicaux internes.

On observera également que, pour répondre aux arguments de l’employeur sur la confidentialité d’un certain nombre de données comme la rémunération, la Cour de cassation a pris soin de préciser que l’employeur pouvait remettre des copies de ces éléments (registre du personnel et DADS) expurgées des éléments confidentiels. Cependant la Cour de cassation suggère soit de « mettre à disposition » soit communiquer une copie ou un extrait. Or c’est seulement lorsqu’il communique une copie ou un extrait que l’employeur est invité à expurger les éléments confidentiels. A lire l’arrêt à la lettre, quand il s’agit d’une mise à disposition (donc une consultation sans copie), il n’y a pas d’expurgation possible. Les employeurs préfèreront sans doute préparer un extrait ou une copie expurgée.

Anne CIRET

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