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TGI Paris, 17ème Ch. Corr., 11 juillet 2014

Les dispositions des articles 6.III-1 et VI-2 de la loi du 21 juin 2004 sur la confiance dans l’économie numérique, visant à permettre l’identification des éditeurs, du directeur de la publication et de l’hébergeur ont pu sembler difficiles à appliquer à l’égard de sites édités par des sociétés étrangères non identifiées.

Le Tribunal vient, en l’espèce, de rappeler les possibles points de rattachement et critères d’administration d’un site, y compris, en cas de cessions multiples et successives de ce dernier entre sociétés étrangères.

Une société victime d’un commentaire dénigrant posté sur le site internet www.notetonentreprise.com sous le pseudonyme « postprod », avait déposé plainte entre les mains du procureur de la République pour « site internet non-conforme, défaut de mentions légales et défaut de réponse par l’éditeur du site à la demande d’une autorité judiciaire ».

Une ordonnance avait enjoint, en vain, à l’éditeur du site concerné de communiquer « toute données permettant l’identification de la personne ayant mis en ligne le commentaire litigieux » puisqu’aucune des mentions légales prescrites par l’article 6 III.-1 de la loi du 21 juin 2014 ne figurait sur le site.

Une société hollandaise destinataire d’une demande de suppression y avait procédé. L’enquête a alors consisté à déterminer l’identité des administrateurs du site et donc à qui revenait la charge du respect des obligations posées à l’article 6 III.-1 de la loi à savoir notamment la mise à disposition du public dans un standard ouvert des données d’identification de l’éditeur, du directeur de la publication et de l’hébergeur.

Le site avait en effet été créé et édité par une société de droit américain qui l’avait revendu à une personne physique. Cette dernière l’avait acheté en son nom personnel mais avec les fonds d’une société luxembourgeoise qu’elle dirigeait. Il avait en outre été relevé que cette société luxembourgeoise s’était, à son tour, vue rembourser le montant de l’acquisition par une autre société ayant pour activité l’édition de site internet et gérée par un membre de la famille du premier cessionnaire, en l’occurrence son père. Le site litigieux avait finalement été revendu à une société hongkongaise, inconnue, et ne faisant l’objet d’aucune inscription au registre des sociétés locales.

Postérieurement à ces opérations, un compte Google Adsense permettait de retracer la diffusion de publicités sur le site litigieux. Ce compte avait été ouvert au nom du premier cessionnaire du site mais rattaché à la société du père d’une part et utilisé à partir d’une adresse électronique portant le nom de la société du premier cessionnaire d’autre part. Les publicités diffusées avaient ainsi généré des revenus au bénéfice des deux sociétés concernées : celle du père et du fils. Des connexions régulières vers l’administration du

compte Google Adsense provenaient encore d’une adresse mail rattachée à une autre société présidée également par le premier cessionnaire.

Le Tribunal considère en conséquence que postérieurement à la vente du site litigieux, les deux dirigeants des sociétés bénéficiaires des revenus issus des publicités affichées sur le site litigieux versés depuis la régie publicitaire Google Adsense ont continué d’administrer de fait le site litigieux.

Ils sont donc retenus dans les liens de la prévention et condamnés chacun à une amende de 6000 euros pour ne pas avoir mis à la disposition du public dans un standard ouvert les données d’identification requises par les dispositions de l’article 6 III.-1 de la loi du 21 juin 2014.

La partie civile se voit quant à elle allouer l’euro symbolique en réparation du préjudice moral subi du fait de l’impossibilité pour elle d’exercer un droit de réponse à la suite de la publication du commentaire incriminé, et ce faute de mention du nom du directeur de la publication.

L’administration d’un compte Google Adsense constitue ainsi un point de rattachement qui peut permettre de contourner l’écueil de l’anonymat dans la nébuleuse des cessions de site internet intervenues au bénéfice de sociétés étrangères, comblant ainsi, par la prise en compte de ce critère, le vide dans lequel certains litiges semblent pouvoir tomber en l’absence de données d’identification de l’éditeur, du directeur de la publication et de l’hébergeur de ces sites.

Armelle FOURLON

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Confirmation en appel du statut d’éditeur d’un site de vente aux enchères et de parking de noms de domaine

  

 

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