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CE, 8ème et 3ème chambres réunies, 23 décembre 2016

Une société J. avait sollicité du maire de la commune de Tours l’autorisation de prendre des clichés d’œuvres appartenant aux collections du musée des Beaux-Arts de Tours. Ce dernier ayant implicitement rejeté cette demande, la société avait saisi le juge administratif d’une requête en annulation pour excès de pouvoir.

Par un arrêt du 29 octobre 2012, le Conseil d’Etat a annulé cet arrêt d’appel, au motif que « la prise de vue d’œuvres appartenant aux collections d’un musée public, à des fins de commercialisation des reproductions photographiques ainsi obtenues, doit être regardée comme une utilisation privative du domaine public mobilier ». Par conséquent, selon le Conseil d’Etat, une autorisation devait être préalablement obtenue, en vertu de l’article L.2122-1 du Code général de la propriété des personnes publiques qui prévoit que « nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d’une personne publique (…) ou l’utiliser dans des limites dépassant le droit d’usage qui appartient à tous » (CE, 29 octobre 2012, n°351173)

Puis, saisie sur renvoi, la Cour administrative d’appel de Nantes a débouté la société J., qui a alors formé un pourvoi (CAA Nantes, 28 février 2014).

Par un arrêt du 23 décembre 2016, les 8ème et 3ème chambres réunies du Conseil d’Etat ont confirmé la position adoptée dans l’arrêt du 29 octobre 2012 :

– le Conseil d’Etat constate tout d’abord que les collections de musée font partie du domaine public mobilier, en vertu de l’article L2112-1 du Code général de la propriété des personnes publiques ;

– le Conseil d’Etat confirme ensuite l’analyse faite dans l’arrêt du 29 octobre 2012, et considère que la prise de vue d’œuvres appartenant aux collections d’un musée public nécessite d’obtenir une autorisation en vertu de l’article L.2122-1 précité, car il s’agit d’une « utilisation privative du domaine public mobilier » ;

– le Conseil d’Etat ajoute qu’une autorisation d’utilisation privative du domaine public peut être accordée mais que la collectivité publique affectataire d’œuvres du domaine public mobilier peut également refuser l’octroi d’une telle autorisation, dans le respect du principe d’égalité et sous contrôle du juge de l’excès de pouvoir.

En l’espèce, si le caractère « privatif » de l’utilisation du domaine public peut être contesté (la prise des clichés ne nécessitant pas le déplacement des œuvres), cet arrêt devrait mettre un terme aux positions divergentes exprimées par les juges du fond.
Il s’inscrit dans un contexte plus global de contrôle de l’utilisation de l’image du domaine public.

A la suite de l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes du 16 décembre 2015, qui avait jugé que l’utilisation à des fins commerciales de l’image du château de Chambord n’était pas soumise à autorisation (CAA Nantes, 16 décembre 2015, n°12NT01190), un nouvel article L.621-42 a été introduit dans le Code du patrimoine qui prévoit que « l’utilisation à des fins commerciales de l’image des immeubles qui constituent les domaines nationaux (…) est soumise à l’autorisation préalable du gestionnaire de la partie concernée du domaine national ». Aucune disposition similaire n’existe pour les meubles du domaine public, ce qui explique peut-être cette interprétation extensive de l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

Antoine JACQUEMART

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