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Articles 17 & 21 de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels

La loi Travail instaure de nouvelles règles en matière de négociation collective, pour faciliter et favoriser une culture du dialogue et de la négociation.

La loi Travail instaure des nouvelles règles fondamentales pour donner une place centrale à la négociation collective et, en particulier à l’accord d’entreprise ou d’établissement.

I. Nouvelles règles de validité des accords dans l’entreprise

A. L’accord majoritaire devient un principe

Le législateur substitue à l’existence d’une unique procédure avec deux conditions cumulatives, une procédure principale et une procédure subsidiaire permettant la validité d’un accord.

Pour mémoire, sous l’empire des anciennes dispositions, un accord d’entreprise ou d’établissement n’était en principe valide, qu’à la double condition d’être signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 30% des suffrages exprimés aux dernières élections, et ne pas être frappé d’opposition par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés.

Désormais, l’accord majoritaire devient la règle, ce qui renforce la légitimité de l’accord d’entreprise ou d’établissement.

Un accord majoritaire

Par majoritaire, il faut entendre que les accords doivent être signés par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50% des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections professionnelles (C.trav.art.L.2232-12 al.1). Ce sont bien les suffrages exprimés en faveur des organisations syndicales représentatives qui sont retenus, c’est-à-dire celles ayant obtenu au moins 10%.

Si cette règle de majorité s’appliquait déjà à quelques accords (ceux déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l’emploi, accords de maintien de l’emploi, accords adaptant les règles de négociation ou instituant une instance regroupée), elle est dorénavant élargie à l’ensemble des accords d’entreprise ou d’établissement.

Une consultation des salariés

Si les signataires n’ont pas recueilli les 50% nécessaires mais seulement plus de 30% des suffrages, une consultation des salariés permet de valider l’accord. Celle-ci doit être demandée par les organisations syndicales dans le délai d’un mois à compter de la signature de l’accord. A l’issu de cette demande, les autres syndicats représentatifs disposent d’un délai de 8 jours pour se rallier à la signature et permettre le dépassement des 50%.

Si le taux n’est toujours pas atteint à cette date, la consultation des salariés est organisée dans un délai de 2 mois. L’accord est valide s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés (C.trav.art.L.2232-12 al.2 et 3).

Cette possibilité de recours à la consultation des salariés est d’un grand secours face à un éventuel blocage du dialogue social. Qui plus est, l’accord majoritaire devient légitime pour les salariés et responsabilise les organisations syndicales.

Une entrée en vigueur progressive

Ces règles vont s’appliquer progressivement, afin de ne pas compromettre les négociations en cours. Si elles sont déjà applicables depuis le 10 août 2016 pour les nouveaux accords de préservation ou de développement de l’emploi, elles ne le seront qu’à compter du 1er janvier 2017 pour les accords portant sur la durée du travail, les repos et les congés ; et à compter du 1er septembre 2019 pour les autres accords.

Lorsqu’un même accord comporte des thèmes différents, il convient d’appliquer, en toute logique, les règles de validité spécifiques y afférentes pendant la période d’application progressive.

B. Assouplissement de la négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical

Accord avec des élus non mandatés

La validité des accords conclus avec des élus non mandatés est simplifiée. Auparavant soumise à deux conditions de validité, la conclusion des accords par des élus non mandatés est désormais réduite à une seule condition.

Si les accords doivent toujours être conclus par des élus titulaires représentant la moitié des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles, leur validité n’est plus subordonnée à l’approbation par une commission paritaire de branche. Seule une transmission de l’accord pour information est requise ; sans que cela soit un préalable au dépôt ni à l’entrée en vigueur de l’accord (C.trav.art.L.2232-22).

Elargissement de la révision

Le régime de la révision est aligné sur celui de la négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical.

Ainsi, tous les élus peuvent négocier, conclure ou réviser un accord d’entreprise ou d’établissement (C.trav.arts.L.2232-21 et L.2232-22).

De plus, dans les entreprises où aucun élu n’a souhaité négocier, ou bien en l’absence de représentants élus établie par un procès-verbal de carence, ou encore dans celles comptant moins de 11 salariés, tout salarié mandaté par un syndicat représentatif au niveau de la branche ou, à défaut, au niveau national et interprofessionnel, peut négocier avec l’employeur la conclusion ou la révision d’un accord (C.trav.art.L.2232-24).

Elargissement du champ de la négociation

Le champ de la négociation est considérablement élargi pour les salariés mandatés, élus ou non, puisqu’ils peuvent désormais négocier, conclure ou réviser tous types d’accords. Tandis que la négociation avec des élus non mandatés reste limitée aux accords relatifs à des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif.
Ces mesures sont applicables depuis le 10 août 2016.

II. Réforme des règles de révision et de dénonciation des accords

A. Faciliter la révision

La nouvelle loi facilite la procédure de révision des accords à tous les niveaux.

Anciennes dispositions

Sous l’empire des anciennes dispositions, à défaut de précisions dans l’accord, la révision n’était possible que par les organisations syndicales signataires ou par celles y ayant adhéré ultérieurement. Quant à l’avenant de révision, il devait être conclu par des syndicats signataires franchissant le seuil de 30% des suffrages, et ne pas être frappé d’opposition par des organisations syndicales représentatives dépassant 50% des suffrages exprimés.

Cela aboutissait à des situations problématiques où une organisation syndicale signataire refusait la révision alors qu’elle n’était plus représentative, ou encore l’impossibilité pour les syndicats signataires d’atteindre le seuil de 30% des suffrages aux dernières élections, nécessaire à la réouverture des négociations.

Pour remédier à ces situations de blocage, les nouvelles dispositions font désormais une distinction selon que l’on se trouve dans ou hors un cycle électoral de 4 ans.

Nouvelles dispositions

S’agissant des accords conclus au niveau de l’entreprise ou de l’établissement, les organisations syndicales de salariés représentatives et signataires ou adhérentes de l’accord sont habilitées à engager la procédure de révision jusqu’à la fin du cycle électoral (C.trav.art.L.2261-7-1, I).

Postérieurement à cette période, tous les syndicats de salariés représentatifs sont habilités à engager la procédure de révision des accords d’entreprise et d’établissements.

Les nouvelles conditions de validité des accords exposées ci-dessus (I, A) sont, bien entendu, applicables progressivement à la signature de l’avenant de révision des accords d’entreprise et d’établissements.

Au niveau interprofessionnel et de branche, les syndicats de salariés représentatifs et les organisations professionnelles d’employeurs signataires ou adhérents sont habilités à réviser les accords jusqu’à la fin du cycle électoral (C.trav.art.L.2261-7).

Postérieurement, la procédure de révision peut être engagée par toutes les organisations syndicales représentatives, ainsi que par toutes les organisations professionnelles d’employeurs signataires, mais aussi celles représentatives dans le champ d’application de l’accord.

Les avenants de révision ayant vocation à être étendus doivent être signés par une ou plusieurs organisations professionnelles d’employeurs représentatives dans son champ d’application (C.trav.art.L.2261-7).

Ces dispositions facilitent la révision des accords, compte tenu du fait que certains syndicats signataires ne sont plus forcément représentatifs, tandis que d’autres, non signataires, sont devenus représentatifs.

B. Aménager la dénonciation et la mise en cause

Efficacité de la dénonciation

Auparavant, en cas de dénonciation par la totalité des signataires employeurs ou salariés, la négociation d’un accord de substitution ne pouvait être engagée que dans les 3 mois suivant la date de dénonciation de l’accord.

Désormais, c’est dans les 3 mois suivant le début du préavis de dénonciation que la négociation d’un accord de substitution peut s’engager ; étant précisé que la négociation peut déboucher sur un accord même avant l’expiration de ce préavis (C.trav.art.L.2261-10).

Ces dispositions, qui permettent d’engager le plus tôt possible la négociation, sont entrées en vigueur le 10 août 2016.

Aménagement des règles de mise en cause

Par ailleurs, la loi Travail complète le dispositif existant afin d’inciter les employeurs à anticiper les conséquences d’un transfert d’entreprise.

Pour mémoire, en cas de mise en cause d’un accord collectif du fait d’une modification de la situation juridique ou d’un changement d’activité de l’employeur, une nouvelle négociation doit s’engager dans les 3 mois suivant la mise en cause, à la demande d’une des parties intéressées, pour l’adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables, ou bien pour l’élaboration de nouvelles dispositions (C.trav.art.L.2261-14).

Les nouvelles dispositions apportent des précisions en cas de mise en cause résultant d’une modification de la situation juridique de l’employeur, en distinguant deux situations.

Soit le cédant et le cessionnaire engagent une négociation avec les organisations syndicales représentatives du cédant, en vue de conclure un accord de substitution. D’une durée maximale de 3 ans, cet accord s’applique aux seuls salariés transférés et à l’exclusion des dispositions ayant un objet identique des accords applicables chez le cessionnaire (C.trav.art.L.2261-14-2).

Soit le cédant et le cessionnaire engagent une négociation avec leurs organisations syndicales respectives pour la conclusion d’un accord dit d’adaptation. Cet accord a vocation à se substituer ou à réviser les dispositions conventionnelles applicables au sein de chaque entreprise concernée, et s’applique à l’ensemble des salariés impactés par l’opération (C.trav.art.L.2261-14-3).

La date d’entrée en vigueur de l’accord est la date de réalisation de l’évènement ayant entrainé sa mise en cause, que ce soit pour l’accord de substitution ou l’accord d’adaptation. L’application de ces accords est donc conditionnée à la survenance de l’opération.

Par ailleurs, les règles de validité de ces accords sont celles de droit commun. Aussi, les nouvelles règles de validité exposées précédemment (I, A) vont s’appliquer progressivement selon le thème de l’accord ; l’appréciation de l’audience des syndicats se faisant dans leur entreprise respective.

Manon CAVATORE

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