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Articles 105 à 112 de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (dite « loi travail » ou « loi El Khomri »)

Depuis deux ans, la lutte contre le détachement illégal se renforce, se traduisant notamment par une obligation de vigilance de l’entreprise d’accueil, des obligations déclaratives pesant sur le l’employeur étranger et/ou le bénéficiaire de la prestation en France ou encore par des sanctions administratives.

Renforcement des mesures déclaratives de l’employeur étranger détachant des salariés en France et du contrôle de l’entreprise d’accueil

L’entreprise (ie, le donneur d’ordre) qui fait réaliser une prestation par des salariés détachés en France a déjà l’obligation de vérifier, avant le début du détachement, que l’entreprise étrangère s’est acquittée de ses obligations déclaratives, et doit si ce n’est pas le cas, procéder à sa place aux déclarations dans les 48 heures du début du détachement (art. L 1262-4-1 trav.).

Depuis la loi Travail, le donneur d’ordre doit également vérifier avant le début du détachement que ces obligations déclaratives sont respectées par chacun des sous-traitants directs ou indirects de ses co-contractants ainsi que par les entreprises de travail temporaires avec lesquelles le co-contractant ou ses sous-traitants auraient contractés. En revanche, le maître d’ouvrage n’a pas à effectuer de déclaration à la place des sous-traitants de son cocontractant.

Le maitre d’ouvrage qui n’a pas procédé à cette vérification, est passible d’une amende administrative si les sous-traitants directs ou indirects de son co-contractant n’ont pas procédé à la déclaration de détachement (art. L 1264-2). Cette amende, d’un montant de 2000 euros maximum par salarié détaché, ou 4000 euros en cas de réitération (plafonnée à 50 000 euros) était déjà instaurée en cas de non vérification des obligations déclaratives par le cocontractant directe (art L1264-3.). Un décret est attendu pour préciser les modalités d’application de cette sanction administrative.

La loi Travail précise que l’accomplissement des formalités déclaratives liées au détachement ne présume pas du caractère régulier du détachement (art. L1262-2-1).

La déclaration subsidiaire de détachement devra être effectuée par voie dématérialisée

Si le bénéficiaire de la prestation en France ne s’est pas vu remettre une copie de la déclaration de détachement, il doit adresser, dans les 48 heures du début du détachement, une déclaration à l’inspection du travail au lieu et place du prestataire étranger (déjà prévu par l’article L1264-1). La loi Travail ajoute que cette déclaration devra être effectuée par voie dématérialisée, dans les conditions qui seront fixée par un décret.

Une nouvelle sanction administrative : la suspension de la prestation de service

La loi Travail instaure une nouvelle sanction, plus dissuasive : la suspension de la prestation de service. Si l’inspection du travail n’a pas reçu la déclaration de détachement, dans un délai de 48 heures à compter du début du détachement, il peut saisir d’un rapport « l’autorité administrative », laquelle peut ordonner, par décision motivée, la suspension de la réalisation de la prestation de services pour une durée ne pouvant excéder un mois.

L’autorité met fin à la suspension dès réception de la déclaration de détachement transmise par l’employeur, le donneur d’ordre ou le maître d’ouvrage (art. L1263-4-1). Un décret doit préciser les modalités d’application de cette sanction. La suspension de la prestation de service ne peut entrainer « ni rupture, ni suspension du contrat de travail, ni aucun préjudice pécuniaire pour les salariés concernés » (art. L1263-5).

Le non-respect de la décision administrative de suspension de la prestation de service est passible d’une amende administrative d’au maximum 10 000 euros par salarié concerné (montant fixé par l’autorité administrative compte tenu des circonstances et de la gravité du manquement, du comportement de son auteur ainsi que des ressources et des charges (art. L1263-6).

Le contrôle du double détachement : déclaration supplémentaire de l’entreprise étrangère

Lorsqu’une entreprise établie hors de France a recours pour l’exercice d’une activité en France à des salariés détachés mis à sa disposition par une entreprise de travail temporaire (ETT) également établie hors de France, elle doit, envoyer à l’inspection du travail du lieu où débute la prestation en France, une déclaration attestant que l’ETT a connaissance du fait que ses salariés seront détachés en France et des règles qui leur sont applicables (art. L1262-2-1).

Le non-respect de cette obligation est passible d’une amende administrative de 2000 euros par salarié détaché (plafonnée à 10 000 euros).

Une contribution à la charge de l’employeur qui détache des salariés en France

L’employeur qui détache des salariés en France est assujetti à une contribution, destinée à financer le coût de fonctionnement du système dématérialisé de la déclaration de détachement. Le montant de cette contribution, qui sera fixée par décret, n’excédera pas 50 euros par salarié détaché (art. L1262-4-6).

Cette contribution est la charge du donneur d’ordre ou du maître d’ouvrage s’il doit effectuer, à la place de son co-contractant étranger, les déclarations de détachement car ce dernier ne s’est pas acquitté de ses obligations déclaratives.

Obligation de déclaration des accidents du travail

Jusqu’à présent, lorsqu’un salarié détaché, non affilié à un régime français de sécurité sociale, était victime d’un accident du travail, une déclaration d’accident devait être effectuée à l’inspection du travail du lieu de survenance de l’accident (art R 1262-2).

Cette obligation est étendue à tous les salariés détachés victime d’un accident du travail. Cette déclaration est effectuée par l’employeur du salarié détaché ou son représentant si la prestation est effectuée pour le propre compte de l’employeur (sans qu’il existe de contrat entre l’employeur et un destinataire en France). Elle est en revanche effectuée par le donneur d’ordre ou le maître d’ouvrage, si la prestation est effectuée entre établissements ou entreprise d’un même groupe ou dans le cadre d’une prestation de service (art L1262-4-4).

Le non-respect de cette obligation déclarative est passible d’une sanction administrative de 2000 euros par salarié concerné (art. L1264-3).

Transposition de la directive 2014/67 UE du 15 mai 2014 relative à l’exécution de la directive 96/71 concernant le détachement de travailleur dans le cadre d’une prestation de service

Selon cette directive, chaque Etat membre peut demander à un autre Etat d’exécuter une sanction (non susceptible d’appel) administrative infligée dans l’Etat membre requérant.

La loi Travail transpose ainsi dans le code du travail ces dispositions : lorsqu’un prestataire de service établi en France s’est vu notifié par un autre pays européen une amende administrative à l’occasion du détachement de salarié dans ce pays européen, la sanction administrative est constatée par l’Etat et recouvrée « selon les règles applicables en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine » (art. L1264-4).

D’autres mesures spécifiques sont également prévues en cas de détachement dans le secteur du BTP, qui ne seront pas examinées ici

Muriel de LAMBERTERIE

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