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Il nous parait utile de revenir sur une décision rendue l’année dernière par la chambre sociale de la Cour de cassation, le 7 mai 2024 (22-20857), précisant les conséquences de la rupture de la période probatoire d’un salarié reclassé, déclaré inapte sur son poste initial par le médecin du travail. Concrètement, l’employeur a pu valablement licencier le salarié pour inaptitude plus de 8 mois après l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail.
 
Un salarié, embauché en qualité d’aide-soignant, avait été déclaré inapte à son poste le 27 juin 2017 par le médecin du travail. En septembre 2017, il avait été reclassé au poste d’assistant administratif, ce reclassement étant assorti d’une période probatoire. L’employeur avait finalement rompu la période probatoire du salarié sur le poste d’assistant administratif, et, le 29 mars 2018, l’avait licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
 
La cour d’appel jugea le licenciement sans cause réelle et sérieuse considérant que le salarié, qui avait été reclassé sur le poste d’assistant administratif, n’occupait plus son poste initial d’aide-soignant pour lequel il avait été déclaré inapte. Elle en déduisit que l’employeur ne pouvait se fonder sur l’avis d’inaptitude au poste d’aide-soignant pour prononcer le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement du salarié.
 
Saisie d’un pourvoi de l’employeur, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle d’abord les dispositions de l’article L1231-1 du code du travail. La Cour de cassation déduit de ce texte que (§8) :
 
« si, en cours de contrat, les parties peuvent convenir, à l’occasion d’un changement de fonction du salarié, d’une période probatoire, la rupture de celle-ci a pour effet de replacer le salarié dans ses fonctions antérieures. »
 
Puis cassant la décision de la cour d’appel, la chambre sociale juge que (§9 et 10) :
 
« 9. Pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient que le licenciement a été prononcé sur la base d’un avis d’inaptitude à d’autres fonctions que celles effectivement occupées par le salarié.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si le reclassement du salarié sur le poste d’assistant administratif était assorti d’une période probatoire, rompue avant son expiration, de sorte qu’il avait été replacé dans ses fonctions antérieures auxquelles il avait été déclaré inapte, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. »
 
Lorsqu’un salarié déclaré inapte est reclassé sur un poste avec une période probatoire, la rupture de cette période entraîne le retour du salarié sur son poste d’origine. Si ce poste d’origine correspond au poste pour lequel il avait été déclaré inapte par le médecin du travail, alors l’employeur peut valablement reprendre la procédure de licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, en se fondant sur l’avis d’inaptitude initial.
 
Cette solution semble logique : la période probatoire, par nature, permet à l’employeur comme au salarié d’apprécier la compatibilité du salarié à ses nouvelles fonctions. Sa rupture remet donc le salarié dans sa situation antérieure. Or, si cette situation antérieure correspond précisément aux fonctions pour lesquelles le salarié a été déclaré inapte, l’employeur est fondé à licencier le salarié sur la base de cette inaptitude en cas d’impossibilité de reclassement, fût-ce plusieurs mois après le constat de cette inaptitude.

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