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Cass. Soc. 14 décembre 2016, 15-21898 et 15-22474

En matière de maternité, les règles relatives à la durée du congé, à sa rémunération, et à la protection contre le licenciement pendant la grossesse varient significativement selon la convention collective dont relève l’entreprise. L’arrêt de la Cour de cassation du 14 décembre 2016 vient de nous le rappeler et illustre la difficulté qu’il y a à combiner les dispositions légales et celles négociées par les partenaires sociaux.

L’affaire concernait une banque. La convention collective nationale de la banque du 10 janvier 2000 prévoit qu’à l’issue de son congé de maternité légal, la salariée a la faculté de prendre un congé supplémentaire rémunéré de 45 jours calendaires à plein salaire (ou de 90 jours calendaires à mi-salaire).

Une salariée avait été licenciée pour motif économique, avant que son employeur soit au courant de son état de grossesse. La salariée avait, comme le lui permet le Code du travail, envoyé son certificat de grossesse et demandé l’annulation de son licenciement. L’employeur avait refusé d’annuler le licenciement, se prévalant du fait que la suppression de son poste intervenue dans un contexte économique dégradé caractérisait une impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à sa grossesse. L’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse est en effet une circonstance qui permet de prononcer le licenciement en période de grossesse hors congé de maternité (protection relative). Ni le Conseil de prud’hommes ni la Cour d’appel n’ont suivi l’employeur, ils ont déclaré le licenciement nul, et la Cour de cassation a validé la décision de la Cour d’appel. Se posait dès lors la question de l’indemnisation à verser à la salariée.

Lorsque le licenciement est nul, le Code du travail (article L1225-71) prévoit que l’employeur doit verser le montant du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité. Dans l’affaire en question, quelle était dès lors la durée de la période couverte par la nullité, autrement dit quelle était la durée de la période de protection ?

On parle ici de la protection relative, c’est-à-dire de la période pendant laquelle l’employeur peut notifier un licenciement (dans des cas très limités), et non de la protection absolue, période pendant laquelle l’employeur ne peut en aucun cas prononcer un licenciement (la durée du congé de maternité). La définition de la période de protection relative est importante, car elle a été substantiellement allongée par la loi Travail du 8 août 2016. Elle couvre aujourd’hui toute la période de grossesse, les congés payés pris immédiatement après le congé de maternité, et les dix semaines suivant l’expiration de ces périodes (nouvel article L1225-4 premier alinéa du Code du travail).

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, la question était de savoir si la période de 45 jours prévue par la convention collective de la Banque s’ajoutait aux périodes de protection relative prévues par le Code du travail (à l’époque seulement quatre semaines après le congé de maternité). La Cour d’appel avait répondu par l’affirmative, et avait donc condamné l’employeur à payer le salaire pour la période s’achevant 45 jours plus quatre semaines après la fin du congé de maternité. La Cour de cassation a cassé cet arrêt et a posé que la convention collective n’ayant pas instauré une période de protection interdisant ou limitant le droit, pour l’employeur, de procéder à un licenciement, l’indemnisation ne pouvait pas prendre en compte cette période supplémentaire.

Cette affaire illustre la diversité des situations au regard de la maternité.

Le Code du travail assure pour l’essentiel une protection contre le licenciement, et un droit au repos, qui n’est toutefois qu’imparfait puisqu’il ne prévoit pas de garantie de rémunération pendant ce repos.

Rappelons en effet qu’aucune disposition du Code du travail n’impose à l’employeur de maintenir le salaire de la salariée en congé de maternité. Ses obligations se limitent à lui accorder le congé et à ne prononcer en aucun cas le licenciement. L’indemnisation du congé de maternité n’est prévue que par le code de la sécurité sociale, et encore à un niveau parfois très insuffisant, puisque limité au plafond de la sécurité sociale. La salariée et son employeur doivent donc se reporter à la convention collective, s’il y en a une, ou aux accords négociés dans l’entreprise, pour savoir si la salariée dont la rémunération excède le plafond de la sécurité sociale, a droit à un maintien de sa rémunération pendant son congé de maternité. Cette absence de garantie légale est d’ailleurs assez surprenante car si la salariée a un droit (et non une obligation) au repos (un congé de 16 semaines, éventuellement plus long dans certains cas), elle a tout de même l’obligation de prendre ce congé, pendant une période de 8 semaines avant et après l’accouchement (six semaines après). Autrement dit, le Code du travail l’oblige à prendre un congé sans pour autant lui garantir le maintien intégral de sa rémunération.

La diversité des situations est donc réelle suivant la convention collective applicable au contrat de travail et les accords collectifs qui ont pu être négociés par l’employeur.

Précisons aussi que les textes européens ne prévoient pas non plus d’obligation pour l’employeur de maintenir intégralement le salaire. Une affaire jugée par la CJUE en est une illustration récente. Selon le droit de l’Union, la salariée a droit à un congé de maternité de 14 semaines, pendant lequel elle a droit au maintien d’une rémunération et/ou d’une prestation lui assurant des revenus au moins équivalents à ceux qu’elle recevrait en cas d’arrêt de travail pour maladie, dans la limite d’un plafond éventuel déterminé par les législations nationales. Dans un arrêt du 14 juillet 2016 (C-335/15 Ornan), la Cour a dit que la salariée ne pouvait pas revendiquer le maintien intégral de son salaire.

Anne CIRET

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