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Plusieurs décisions méritent d’être rapportées comme points d’actualité du statut de l’agent commercial : elles concernent l’indemnisation due en cas de résiliation du contrat et la qualification d’agent commercial.

Sur l’indemnisation, un arrêt rendu par la Cour d’appel de Rennes le 27 mai 2025 traite de la réparation du préjudice causé à l’agent commercial par la rupture de son contrat à l’initiative de son mandant. Tout en rappelant certains principes intangibles gouvernant cette indemnisation, la Cour d’appel de Rennes a illustré l’application de ces règles de manière originale à deux égards :  les modalités de calcul de l’indemnité compensatrice légale de fin de contrat et la prise en compte, dans ce calcul, de l’année 2021 pourtant affectée par la pandémie du COVID-19.

L’espèce portait sur la résiliation d’un contrat d’agent commercial en matière de vente de biens immobiliers. Ce contrat avait duré 6 ans avant d’être résilié à l’initiative du mandant. Le contrat comportait une clause relative au droit à indemnité de l’agent qui limitait celle-ci à « trois fois la moyenne mensuelle des commissions perçues au cours des 12 derniers mois ayant précédé la rupture ». Les parties étaient en désaccord sur l’application de cette clause que l’agent commercial refusait et que le mandant réclamait. Elles étaient également en désaccord sur la prise en compte de l’année 2021, que l’agent considérait comme non significative en termes de commissions perçues, en raison des conséquences de la pandémie de COVID-19 sur les transactions immobilières réalisées, pandémie qui avait revêtu un caractère tout à fait exceptionnel.

La Cour d’appel de Rennes a, dans un premier temps, rappelé l’obligation légale imposant la réparation intégrale du préjudice subi par l’agent commercial en raison de la rupture de son contrat, préjudice issu de la perte pour l’avenir des revenus qu’il tirait de l’exploitation de la clientèle développée dans l’intérêt commun des parties. La Cour a également rappelé que le principe de l’indemnisation intégrale de l’agent commercial étant d’ordre public selon la loi, toute clause contraire conduisant à limiter cette indemnisation ou à l’exclure était réputée non écrite. Sur la base de ces principes, la Cour a estimé, dans le cas d’espèce, que l’indemnité de cessation de contrat due à l’agent commercial devait, pour correspondre exactement à l’intégralité du préjudice subi, être limitée à un an de commissions brutes (et non pas aux deux années de commissions habituellement allouées par la jurisprudence) et calculée sur la base de la moyenne de deux années de commissions (et non pas de trois années comme le retient la pratique jurisprudentielle).

Par ailleurs, la Cour a refusé d’exclure des deux années de commissions prises comme base de calcul, l’année 2021 correspondant à la pandémie COVID-19. Elle a justifié sa solution en retenant que l’activité d’agence immobilière était, par nature, irrégulière, fluctuante et qu’elle ne dépendait pas d’une clientèle pérenne. Les fluctuations et irrégularités d’activité durant l’année 2021 étaient donc, selon elle, conformes et inhérentes à l’activité même d’agent immobilier.

Ainsi, si par le rappel des principes l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Rennes est conforme à la pratique jurisprudentielle établie, les solutions pratiques données dans le cas d’espèce s’en démarquent.

Sur la qualification du contrat d’agence commercial, deux arrêts, l’un rendu par la Cour d’appel de Nîmes le 6 mai 2025, l’autre par la Cour d’appel de Rennes le 10 juin 2025, présentent l’intérêt d’un rappel des critères de qualification conformes au droit européen issu de la transposition de la directive 86/653 du 18 décembre 1986. Le critère essentiel est le pouvoir de négociation dont l’agent commercial doit disposer et qui suffit à caractériser son statut, indépendamment de son pouvoir de conclure les contrats et de celui de déterminer les prix de vente et les remises et de les modifier.

L’activité essentielle de l’agent commercial doit donc bien être la négociation des contrats pour le compte de son mandant. Les arrêts rappellent en outre que la qualification de contrat d’agent commercial est indépendante de la volonté exprimée par les parties dans la convention signée et de la dénomination qu’elles lui ont donnée. Elle dépend exclusivement des conditions réelles dans lesquelles l’activité est exercée.

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