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Articles 2, 3, 4, 5, 6, 7, 122 & 123 de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels

Afin de lutter efficacement à tous les stades contre les comportements clivant entre les hommes et les femmes, au détriment, au demeurant, dans très grande majorité des cas de ces dernières, la Loi travail est venue renforcer d’une part le traitement de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, mais aussi d’autre part la prévention et la condamnation de différents agissements fautifs.

La Loi El Khomri trace également un fil conducteur s’agissant du traitement de la laïcité dans le monde du travail.

1. Plusieurs apports en matière d’égalité professionnelle

Le contenu de la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est complété par un volet consacré à la déconnexion.

A noter également que les entreprises qui ne sont pas couvertes par un tel accord devront dorénavant établir un plan d’action sur l’égalité professionnelle.

Par ailleurs, aucun accord d’entreprise ne pourra déroger aux stipulations conventionnelles de la branche dans ce domaine.

Enfin, l’employeur pourra désormais demander à l’administration de se prononcer sur la conformité aux dispositions légales de l’accord ou du plan d’action sur l’égalité professionnelle par le biais de la procédure du « rescrit égalité professionnelle ».

2. La prévention contre les agissements sexistes

Jusqu’à présent, le sexisme au travail ne bénéficiait d’aucune existence légale, bien qu’étant, hélas, relativement présent dans le monde travail.

Une enquête de grande ampleur lancée en 2013 sur les relations professionnelles entre les femmes et les hommes a en effet mis en évidence l’expansion de ce phénomène dans le monde du travail, Ainsi, 80% des femmes et 56% des hommes interrogés considèrent que les femmes sont régulièrement confrontées à des attitudes ou des décisions sexistes au travail. Néanmoins, malgré l’ampleur de ces chiffres, seules 9% des salariées ont parlé à leurs supérieurs hiérarchiques des comportements sexistes à leur égard, et 4% aux représentants syndicaux.

Ces chiffres ont donc démontré le manque de visibilité de ce phénomène. Les pouvoirs publics y ont remédié, permettant ainsi la protection juridique des personnes exposées.

Dans un premier temps, la notion d’agissements sexistes a été définie par la loi Rebsamen du 17 août 2015. L’article L. 1142-2-1 du Code du travail stipule désormais :

« Nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».

Attention cependant, pour l’heure, aucune sanction spécifique n’a été prévue par le législateur. A tout le moins, les victimes de tels agissements pourraient poursuivre l’employeur sur le fondement d’un manquement à son obligation de sécurité.

Par ailleurs, la lutte se poursuit également avec la loi travail (article 5 de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016).

Ainsi, dans la continuité de la prévention des risques psychosociaux, l’employeur est désormais tenu à une obligation de prévention à ce sujet également.

Le règlement intérieur doit donc être modifié afin de (article L1321-2 du Code du travail) :

– Rappeler le principe de toute interdiction dans l’entreprise d’agissements à caractère sexiste ;

– De prévenir les risques liés à ces derniers, lesquels doivent donc être inscrits dans la planification des risques professionnels, telle qu’édictée par l’article L.4121-2 du Code du travail :

« L’employeur met en œuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :
[…]

Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l’article L. 1142-2-1 ;
[…] »

3. Lutte contre le harcèlement moral et sexuel au travail

Alignement du régime probatoire du harcèlement sur celui des discriminations

Afin de lutter contre le harcèlement, tant moral que sexuel, le salarié, victime de harcèlement, bénéficie désormais d’un assouplissement des règles de preuve dorénavant alignées sur celles de la discrimination.

Le salarié concerné, lorsqu’il agit en justice, doit dorénavant présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence de harcèlement (et non plus présenter des faits permettant de présumer l’existence de harcèlement).

Renforcement des sanctions

La Loi travail alourdit les sanctions en cas de licenciement discriminatoire ou lié au harcèlement, à savoir :

– Condamnation de l’employeur à rembourser de tout ou partie des allocations chômage versées au salarié licencié dans la limite de 6 mois d’indemnités de chômage ;

– Alignement des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse aux licenciements jugés discriminatoires ou qui résultent d’un harcèlement : octroi d’une indemnité à la charge de l’employeur qui ne peut pas être inférieure aux salaires des 6 derniers mois lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de son contrat ou que sa réintégration est impossible.

4. Le principe de neutralité peut figurer dans le règlement intérieur

Cette nouvelle disposition s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence dégagée par l’affaire Baby-Loup (cf. Cass. Ass. plén. 25 juin 2014, n°13-28369), puis par la mission Badinter, laquelle avait énoncé que la liberté de manifester ses convictions religieuses n’était pas absolue et pouvait dès lors être limitée sous certaines conditions.

Le règlement intérieur peut désormais prévoir un principe de neutralité, ayant pour conséquence de restreindre la manifestation des convictions religieuses des salariés si « ces restrictions sont justifiées par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché » – Article L1321-2-1 du code du travail.

Reste à savoir si ce nouvel article du Code du travail passera sous les fourches caudines de la CJUE s’agissant de sa conformité au droit européen…

Bettina SCHMIDT

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