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Nous revenons sur une décision publiée rendue par la chambre sociale de la Cour de cassation le 21 mai 2025 (23-18003), qui précise, en cas d’arrêt de travail pour maladie d’un salarié, les modalités procédurales applicables de report de son entretien préalable à un éventuel licenciement.

Une salariée avait été convoquée par courrier en date du 31 octobre 2016 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 9 novembre 2016. Le courrier de convocationrespectait donc bien le délai de 5 jours ouvrables entre sa présentation et la date de l’entretien préalable, tel que prévu à l’article L1232-2 du code du travail. La salariée ayant été placée en arrêt de travail pour maladie jusqu’au 16 novembre 2016, la société avait, de sa propre initiative, par courrier du 24 novembre 2016, reporté au 30 novembre 2016 l’entretien préalable, soit sans respecter cette fois ledit délai de 5 jours ouvrables. La salariée avait ensuite été licenciée pour faute grave le 3 décembre 2016.

Contestant son licenicement et, en particulier, la procédure de licenciement, la salariée saisit la juridiction prud’homale.

La cour d’appel jugea que la procédure de licenciement avait été parfaitement respectée par la société. Elle releva que la salariée avait été convoquée une première fois en respect du délai de cinq jours précité, et que le report de l’entretien était motivé par l’arrêt de travail de la salariée.

Saisie d’un pourvoi de la salariée, la chambre sociale de la Cour de cassation rappelle d’abord les règles prévues à l’article L1232-2 du code du travail à savoir (§7) :

« 7. Selon l’article L. 1232-2 du code du travail, l’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l’objet de la convocation. L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. »

Elle déduit de cet article que (§8) :

« 8. Il en résulte qu’en cas de report de l’entretien préalable, en raison de l’état de santé du salarié, l’employeur est simplement tenu d’aviser, en temps utile et par tous moyens, celui-ci des nouvelles date et heure de cet entretien, le délai de cinq jours ouvrables prévu par ce texte courant à compter de la présentation de la lettre recommandée ou de la remise en main propre de la lettre initiale de convocation. »

A cette occasion, la haute juridiction rappelle notamment que, conformément à l’article L1232-2 du code du travail, le délai de 5 jours ouvrables court à compter de la première présentation de la convocation et non de sa réception par le salarié (Cass. soc., 6 sept. 2023, 22-11661, § 6 à 8). Elle ajoute qu’en cas de report de l’entretien en raison de la maladie du salarié, le délai de 5 jours ne court qu’à compter de « la lettre initiale de convocation ».

Ainsi, approuvant la décision de la cour d’appel et rejetant le pourvoi de la salariée, la Cour de cassation juge que (§9 et 10 ) :

« 9. La cour d’appel a relevé que la salariée avait d’abord été convoquée par lettre du 31 octobre 2016 pour un entretien préalable fixé au 9 novembre 2016, soit dans le respect du délai de cinq jours précité et n’avait été convoquée à nouveau, par lettre du 24 novembre pour un entretien du 30 novembre 2016, en raison de son arrêt de travail s’achevant le 17 novembre 2016.

10. De ces constatations, dont il ressortait que la salariée, qui avait été convoquée par lettre recommandée dans le délai légal, avait été avisée en temps utile des nouvelles date et heure de l’entretien reporté en raison de son état de santé, la cour d’appel en a exactement déduit que la procédure de licenciement était régulière. »

Il ressort de cette décision que lorsque l’entretien préalable est reporté en raison d’un arrêt de travail pour maladie, l’employeur n’est pas tenu d’adresser une nouvelle convocation en respectant à nouveau le délai de cinq jours ouvrables. Il doit simplement informer le salarié, par tout moyen, de la nouvelle date et heure de l’entretien, dès lors que la convocation initiale est régulière.

La solution s’inscrit dans une logique de sécurité juridique : elle évite de sanctionner l’employeur qui s’adapte, volontairement, à la situation du salarié tout en maintenant une information effective et loyale.

La haute juridiction avait déjà jugé qu’en cas de report de l’entretien préalable « à la demande du salarié », le délai de 5 jours courait à compter de la présentation de la convocation « initiale » (Cass. soc., 24 nov. 2010, 09-66616). Elle avait également déjà jugé que dans ce cas (demande de report à la demande du salarié), l’employeur était « simplement tenu d’aviser, en temps utile et par tous moyens, le salarié des nouvelles date et heure » de l’entretien (Cass. soc., 29 jan. 2014, 12-19872). Avec la décision ici commentée, elle ajoute qu’il en est de même quand le report a lieu à l’initiative de l’employeur dès lors qu’il le décide en raison de l’arrêt de travail pour maladie du salarié.

Cette décision invite également à la prudence : dans l’hypothèse d’un report décidé par l’employeur en raison d’un arrêt de travail pour maladie du salarié, nous suggérons de privilégier un écrit, afin d’établir, en cas de contentieux, que le report était bien justifié par l’indisponibilité du salarié due à son arrêt, et non décidé pour convenance personnelle de l’employeur, et que l’information a bien eu lieu « en temps utile ». Rappelons néanmoins qu’en cas de non-respect de la procédure, le salarié n’obtient des dommages et intérêts, dans la limite d’un mois de salaire (art. L1235-2 in fine c. trav.), qu’à la condition de démontrer la réalité d’un préjudice (Cass. soc., 30 juin 2016, 15-16066).

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