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Tribunal de Commerce de Paris, 13 octobre 2020, RG 2017005123

En 2015, l’enseigne de restauration rapide Subway et son réseau de 400 restaurants franchisés ont fait l’objet d’une enquête de la DGCCRF. Les enquêteurs ont examiné les relations entre le franchiseur et ses franchisés au regard des pratiques commerciales et ont relevé que plusieurs pratiques étaient susceptibles de constituer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

Le Tribunal de commerce de Paris, saisi du litige opposant le Ministre de l’Economie et 34 franchisés intervenus volontairement à l’instance à la franchise Subway, a prononcé le 13 octobre 2020 l’annulation de plusieurs clauses contractuelles jugées déséquilibrées au détriment des franchisés et a sanctionné Subway par une amende civile de 500 000 euros – équivalent à 3,5% de son chiffre d’affaires avec les franchisés en France en 2018 – pour trouble grave et manifeste porté à l’ordre public économique.

Les clauses suivantes ont été annulées par le Tribunal qui les a considérées déséquilibrées :

1 . Clause relative aux horaires d’ouverture des points de vente

Le contrat stipule que « tous les restaurants doivent être ouverts 7 jours par semaine, pour un minimum de 98 heures par semaine. »

Les juges ont retenu le caractère déséquilibré de la clause dans la mesure où il s’agit d’une obligation non négociable à la signature du contrat ne prenant pas en compte les spécificités de la localisation du point de vente des franchisés.

2. Clause relative à l’assurance

Le contrat prévoit que, dans le cas où les franchisés ne respectent pas leurs obligations en matière d’assurance, le franchiseur peut être amené – pour faire respecter cette obligation d’assurance – à dépenser des frais incluant notamment « les frais d’arbitrage, les frais d’avocat, le temps de préparation, les frais de témoignage et de voyage », ces sommes étant soumises à remboursement par les franchisés.

Compte tenu de l’absence d’un montant maximum permettant d’encadrer ces dépenses par le franchiseur, le Tribunal a considéré que la clause était déséquilibrée au détriment des franchisés.

3. Clause relative à la durée du contrat

Le contrat entre le franchiseur et le franchisé est conclu pour une durée de 20 ans et renouvelé automatiquement pour des périodes supplémentaires de 20 ans, sauf dénonciation un an avant une période de renouvellement.

Les juges rappellent que la clause d’exclusivité dans un contrat de franchise ne peut excéder 10 ans et que par conséquent, la durée du contrat de franchise aurait dû être limitée à cette même durée. Ils prononcent par conséquent la nullité de la clause.

4. Clause relative à la résiliation du contrat

Les juges prononcent la nullité d’une clause permettant à Subway de résilier le contrat dans le cas où le franchisé devient insolvable, sans toutefois caractériser la situation d’insolvabilité.

Le Tribunal annule également un ensemble de stipulations qui, réunies, permettent au franchiseur après deux retards ou omissions de paiement – y compris de montants infimes ou résultant de circonstances exceptionnelles – sur une période d’un an, de résilier le contrat qui constitue « la source de revenus du franchisé et un projet professionnel et de vie dont la rupture peut être extrêmement difficile à surmonter. »

Le contrat prévoit également que lors de la cessation du contrat, les franchisés détiennent un « délai raisonnable » pour prendre les mesures afin que leurs restaurants ne soient plus identifiés comme un restaurant Subway. A défaut, les franchisés peuvent se voir infliger une pénalité de 175 € par jour de défaillance avec possibilité pour le franchiseur d’augmenter le montant de la pénalité. La clause jugée déséquilibrée, est annulée.

5. Clauses relatives au droit applicable et aux juridictions compétentes en cas de litige

Le Tribunal annule les stipulations du contrat prévoyant que celui-ci est régi par le droit néerlandais et soumis en cas de différent à une procédure d’arbitrage se déroulant à New York.

Les juges considèrent que, « sauf rarissime exception », un commerçant français ne pourrait spontanément accepter d’être soumis au droit néerlandais, « pays dont il ne connait pas la langue et encore moins le droit. »

Quant à la clause compromissoire, ils considèrent également que celle-ci est « éloignée du champ juridique dans lequel opèrent en France les commerçants de détail. »

Cette décision singulière permet de clarifier la manière dont les juges appréhendent le déséquilibre significatif dans les contrats de franchise et de fournir à d’autres acteurs de la franchise des points de vigilance sur les clauses de leurs contrats.

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