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Rapport parlementaire du 2 avril 2025 rendu au nom de la commission d’enquête relative aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité, Assemblée Nationale.

À l’issue de travaux largement relayés dans les médias, la commission d’enquête a rendu un rapport visant à dresser un état des lieux des violences et des conditions de travail, notamment dans l’audiovisuel et le cinéma, et à formuler des recommandations.

En cas de transposition législative, certaines de ces préconisations pourraient modifier les modalités de production impliquant une vigilance accrue des sociétés de production, dont les contrats et les conditions de tournage pourraient alors évoluer. A noter que ce rapport intervient concomitamment à la conclusion, le 21 mars 2025, d’un accord entre les organisations professionnelles des producteurs audiovisuels (Uspa, SPI, Spect, Satev, Spiac-CGT, SFA-CGT, Snam-CGT, F3C-CFDT et SNTPCT) contenant des engagements similaires à certaines recommandations de la commission d’enquête.

D’une part, la commission d’enquête recommande l’intégration systématique de clauses de prévention des violences sexistes et sexuelles (VHSS) dans les contrats de production et de travail. La commission propose que ces clauses figurent dans les contrats de toutes les personnes impliquées dans la production d’un film (recommandation n°41). A noter qu’il s’agit d’une pratique d’ores-et-déjà existante, parfois appelée « clauses de moralité », généralement assortie de sanctions en cas de comportements inappropriés, que ce soit pendant le tournage ou dans la sphère privée dès lors qu’ils affectent la production ou la société de production.

La commission propose également d’exiger, dans les contrats des artistes-interprètes amenés à jouer des scènes d’intimité, des clauses obligatoires précisant le déroulement et les limites de ces scènes. Ces clauses détailleraient notamment les actions et contacts physiques requis par la scène, les limites de ce qui sera monté à l’écran, la présence ou non d’un coordinateur d’intimité (recommandation n°61). La commission d’enquête va jusqu’à souhaiter que les artistes bénéficient d’un droit de regard sur le montage des scènes d’intimité, assorti d’une médiation du CNC en cas de désaccord (recommandation n°62). Bien que cette clause puisse déjà être insérée dans les contrats, son intégration au sein de la loi impliquerait de la mettre en cohérence avec l’article L.121?5 du Code de la propriété intellectuelle, qui réserve l’adoption de la version définitive de l’œuvre à l’accord du réalisateur, des coauteurs et du producteur.

D’autre part, de nombreuses recommandations pourraient conduire à la création de nouveaux postes lors des tournages. A l’instar d’une pratique déjà développée par les plateformes américaines, la commission préconise de rendre obligatoire la présence d’un coordinateur d’intimité pour toutes production des secteurs du cinéma, de l’audiovisuel et du spectacle vivant. Leur mission serait de coordonner l’information et de partager avec la production les limites des artistes. Ces coordinateurs se limiteraient à formuler des propositions, sans disposer d’un pouvoir décisionnel. Il demeure que d’après les sociétés de production auditionnées, cela représente un coût non négligeable à intégrer qui, en tout état de cause, ne les décharge pas de leur obligation de sécurité vis-à-vis des artistes-interprètes engagés.

Il convient de noter que l’accord récemment signé par les organisations professionnelles de l’audiovisuel prévoit que la présence d’un coordinateur d’intimité est obligatoire dès lors qu’un artiste en fait la demande par écrit. Par ailleurs, un référent VHSS spécifique doit obligatoirement être désigné sur les programmes de fiction, dès lors qu’un salarié est volontaire et formé.

Enfin, le rapport insiste sur la formation à tous les stades de la carrière. Pour la formation initiale, la commission d’enquête préconise d’intégrer dans le tronc commun de toutes les écoles publiques et privées du secteur culturel un module, sanctionné par un examen, dédié au droit du travail et à la prévention des violences morales, sexistes et sexuelles (recommandation n°28). Pour la formation continue, il est proposé de conditionner l’accès aux aides du CNC à la participation des agents artistiques à un stage sur la prévention des VHSS (recommandation n°51). Bien que cette mesure réponde à un objectif légitime, on peut s’interroger sur la pertinence de conditionner le financement d’un film au respect, par les agents artistiques, d’obligations qui leur sont personnelles et extérieures au processus de production.

A noter que ce type d’obligation existe d’ores-et-déjà au sein du règlement général des aides du CNC qui prévoit une formation obligatoire pour les producteurs, distributeurs, vendeurs internationaux et exploitants de salle de cinéma.; le suivi de cette formation conditionnant l’octroi des aides financières du CNC. Le Ministère de la Culture dans son plan de lutte contre les VHSS 2025-2027 a d’ailleurs annoncé l’extension de ces formations obligatoire pour le secteur audiovisuel en 2026.

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