Un emballage dépourvu de mention verbale peut être enregistré à titre de marque

CJUE, 3e Ch., 20 octobre 2011, n°C-344/10 et C-345/10, Freixenet SA c. OHMI

La Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu, le 20 octobre dernier, une décision dans le litige opposant la société Freixenet à l’Office pour l’Harmonisation du Marché Intérieur concernant la protection par la marque d’un emballage ne comportant aucune mention verbale.

Dans cette affaire, la société Freixenet avait présenté à l’OHMI deux demandes d’enregistrement de marques communautaires portant sur des bouteilles, l’une émerisée blanche et l’autre émerisée noire mate, sans étiquette ou élément verbal.  L’OHMI rejeta ces demandes considérant que les signes étaient dépourvus de caractère distinctif.

Le Tribunal de Première Instance avait approuvé l’OHMI considérant qu’une marque tridimensionnelle constituée par l’apparence ou l’emballage d’un produit devait, de manière significative, diverger des normes ou habitudes du secteur pour être susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine dans la mesure où le consommateur moyen n’a pas l’habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou leur emballage en l’absence d’élément graphique ou textuel.

Il en résultait selon le Tribunal que seul l’élément verbal – qui ne faisait pas partie de la marque tridimensionnelle déposée – était de nature à permettre l’identification de l’origine des produits, contrairement à la  « la couleur et l’aspect dépoli du verre » de la bouteille qui ne pouvaient assurer une telle fonction.

La Cour de Justice n’a pas suivi la position du Tribunal estimant que celle-ci conduirait au rejet systématique d’une marque constituée par un emballage ou par la forme de produit, sans élément verbal.

La Cour de Justice rappelle, dans cette décision, que les critères guidant l’appréciation du caractère distinctif des marques tridimensionnelles constituées par l’apparence du produit ne sont pas différents de ceux applicables aux autres catégories de marques. Pour autant, la Cour admet que les « consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou celle de leur emballage en l’absence de tout élément graphique ou textuel » et que le caractère distinctif pourrait ainsi s’avérer plus difficile à établir. Il en résulte que seule une marque qui diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur sera distinctive ainsi que l’avait justement rappelé le Tribunal de Première Instance.

En l’espèce, la Cour considère qu’il importait donc de rechercher si les enregistrements en cause divergeaient de manière significative des normes du secteur. Ainsi, la Cour annule l’arrêt attaqué.

Anne Sophie LABORDE