Redressement par l’URSSAF des avances versées à la société d’un comédien au titre de l’exploitation d’un téléfilm

CA Paris, Pôle 6, Ch. 12, 19 juin 2014

Dans cette affaire une société de production avait engagé un acteur célèbre pour tenir un rôle dans un téléfilm en contrepartie du versement d’une somme forfaitaire rémunérant sa prestation d’artiste et la première télédiffusion du film.

Parallèlement à ce contrat d’artiste interprète qui ne soulevait pas de difficulté, avait été conclu entre la société de production, le comédien et la société de ce dernier un contrat de cession de droits voisins, images et voix au terme duquel, la société de production s’engageait à verser à l’artiste via sa société différentes rémunérations proportionnelles ainsi qu’un à-valoir sur ce pourcentage à titre de minimum garanti.

A l’occasion d’un contrôle, l’URSSAF a procédé au redressement des sommes versées à titre de redevances.

Confirmant le redressement ainsi effectué, la Cour d’appel a tout d’abord rappelé que « sont qualifiées de redevances non soumises à cotisation les sommes dues à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de son interprétation, dès que sa présence physique n’est plus requise pour exploiter l’enregistrement et que les sommes sont fonction du produit de la vente ou de l’exploitation ».

La Cour d’appel a ensuite précisé qu’en l’espèce il était établi que le téléfilm n’avait fait l’objet que d’une première diffusion en France et dans les pays francophones, que le comédien avait déjà été rémunéré au titre de cette première diffusion et qu’il n’y avait eu aucune vente ni exploitation ultérieure sur le montant desquelles ce dernier aurait pu prétendre à un pourcentage de recettes.

En conséquence, la Cour a estimé que ces sommes n’avaient aucun caractère aléatoire, ne reposaient sur aucune exploitation et étaient fixées forfaitairement et définitivement au profit de l’artiste, et constituaient ainsi des compléments de salaires qui devaient donc être réintégrés dans l’assiette des cotisations.

Il convient de relever que la Cour n’a pas estimé nécessaire d’ajouter à sa motivation l’argumentation habituelle concernant les schémas d’interposition de la société d’un artiste, ce point n’étant pas l’objet du litige.

Par ailleurs, cette décision permet de rappeler les difficultés relatives à la détermination d’une rémunération proportionnelle au profit des artistes-interprètes d’une œuvre audiovisuelle.

La convention collective du 30 décembre 1992 (définissant les conditions de rémunération des artistes-interprètes engagés pour une œuvre audiovisuelle destinée à une télédiffusion) prévoit une rémunération couvrant la prestation et la première diffusion ainsi que certaines utilisations non commerciales ; les annexes et avenants à la convention prévoient le paiement d’une rémunération pour toute utilisation secondaire sous la forme d’un « salaire complémentaire ».

Il en résulte qu’à la différence du cinéma, il n’est pas aisé de définir contractuellement pour les œuvres audiovisuelles les rémunérations dues au titre des exploitations secondaires et de verser une avance récupérable.

Toutefois s’il est nécessaire de verser à l’artiste-interprète une rémunération complémentaire , qui constituera un salaire conformément à la convention collective, cela n’interdit pas de convenir avec l’artiste du paiement d’une rémunération complémentaire, proportionnelle aux recettes de l’exploitation qui, sous réserve de certaines précautions, pourra ne pas être qualifiée de salaire.

Compte tenu de la nature salariale des compléments de rémunérations conventionnels et de la faible importance des exploitations secondaires de la fiction, la négociation d’avances doit être assurée avec prudence, en respectant les critères définis par la circulaire du 20 avril 2012, à la lumière de l’application qui en est donnée dans les annexes. Ceci peut naturellement évoluer avec la diversification des exploitations des œuvres audiovisuelles, notamment lorsque leur première exploitation sera assurée sur les sites de vidéo à la demande et que les œuvres connaitront une véritable exploitation internationale.

Dorothée SIMIC

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