Recours de l’employeur contre une expertise votée par le Comité d’Hygiène et de Sécurité des Conditions de travail (CHSCT)

Décision du Conseil constitutionnel du 13 octobre 2017, 2017-662

La Loi Travail du 8 août 2016 a réformé la procédure de contestation des expertises votées par le CHSCT.

Pour rappel et conformément à l’article L 4614-12 du Code du travail, le CHSCT peut demander la désignation d’un expert dans deux hypothèses : en cas de risque grave ou en cas de projet important modifiant les conditions de travail.

L’employeur pouvait contester la légitimité du recours à l’expert devant le juge des référés et l’ordonnance rendue était susceptible d’appel dans les conditions du droit commun.

La Loi travail a fixé de nouvelles règles : l’employeur dispose désormais d’un délai de 15 jours à compter du vote du CHSCT pour saisir le juge des référés et il n’est plus possible d’interjeter appel de la décision rendue, seul un pourvoi en cassation étant possible.

Toutefois ce nouveau cadre procédural posait problème dans la mesure où le délai de 15 jours ne permet pas à l’employeur de disposer de tous les éléments de l’expertise et surtout son coût et sa durée.

La question s’est donc posée de savoir si les dispositions fixant un de délai 15 jours à compter de la délibération du CHSCT et supprimant le droit d’appel n’avaient pas méconnu le droit à un recours juridictionnel, constitutionnellement garanti ?

En l’espèce, vingt-six CHSCT représentant des établissements EDF avaient désigné un expert dans le cadre d’un projet de réorganisation des services partagés de la société. Le vote final avait eu lieu le 6 septembre 2016.

Le 4 octobre 2016, l’expert transmettait à la société sa lettre de mission ainsi qu’une estimation du coût prévisionnel de son intervention. Le 17 octobre 2016, EDF assignait l’expert et les CHSCT devant le juge des référés.

Par ordonnance rendue le 16 décembre 2016, le Juge des référés du TGI de Bobigny déboutait la Société de son action au motif qu’elle avait été introduite tardivement et que la forclusion était acquise.

En application de la nouvelle rédaction de l’article L 4614-13 du Code du travail, le juge des référés considérait en effet que point de départ du délai de recours courait à compter du 6 septembre 2016, date de la désignation de l’expert.

EDF a formé un pourvoi en cassation et soulevé une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC). La QPC jugée sérieuse par la chambre sociale a été transmise au juge constitutionnel.

Le Conseil constitutionnel va considérer que les dispositions de l’article L 4614-13 du Code du travail ne sont pas contraires à la Constitution.

Pour parvenir à cette conclusion, le Conseil se fonde sur l’article L 4614-13-1 du Code du travail qui permet à l’employeur de contester le coût final de l’expertise devant le juge judiciaire dans un délai de 15 jours à compter de la date à laquelle il a été informé de ce coût final.

Le juge constitutionnel valide donc le cadre juridique qui permet à l’employeur de choisir entre deux scénarios :

Option 1 : contester la légitimité même du recours à l’expertise dans le cadre d’une première procédure. Le cas échéant et si l’expertise est confirmée, introduire une seconde procédure pour contester le coût et la durée de celle-ci ;

Option 2 : ne contester que le coût et la durée de l’expertise.

Khalil MIHOUBI

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