Prise en compte de l’arrêt de travail dans la détermination de l’ancienneté pour le calcul du barème Macron
Nous revenons sur une décision rendue par la chambre sociale de la Cour de cassation le 1er octobre 2025 (24-15529) qui rappelle que les périodes de suspension du contrat de travail (en l’occurrence la période d’arrêt de travail pour maladie non-professionnelle) ne sont pas déduites de l’ancienneté déterminée pour le calcul de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (barème dit Macron).
Une salariée embauchée le 9 mai 2016 dans une entreprise comptant moins de 11 salariés, avait été placée en arrêt de travail pour maladie non-professionnelle à compter du mois de novembre 2016. Elle avait ensuite été licenciée verbalement le 17 avril 2019 pour motif économique.
La salariée saisit le conseil de prud’hommes en contestation de la cause de son licenciement afin d’obtenir une indemnité pour licenciement sans de cause réelle et sérieuse.
La cour d’appel rejeta la demande de la salariée considérant que bien que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse car verbal, la salariée ne pouvait prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, car, en déduisant les périodes d’arrêts de travail pour maladie non-professionnelle, la salariée ne justifiait pas d’un an d’ancienneté.
Pour rappel, l’article L1235-3 du code du travail, qui prévoit la fourchette du « barème Macron », conditionne en effet l’obtention de cette indemnité à une ancienneté du salarié d’au moins un an dans les entreprises de moins de onze salariés. Or, ce texte ne précise pas si les arrêts de travail d’un salarié sont exclus du calcul de l’ancienneté pour la détermination du montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Saisie du pourvoi de la salariée, la chambre sociale de la Cour de cassation tranche cette question et casse la décision d’appel au visa de l’article L1235-3 du code du travail susmentionné, en jugeant que (§6) :
« Selon ce texte, en cas de licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, le salarié qui compte au moins une année d’ancienneté, peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il en résulte que ces dispositions ne comportent aucune restriction en cas de suspension d’exécution du contrat de travail. ».
A notre sens, ce principe s’applique également aux entreprises comptant 11 salariés ou plus.
A noter, pour « l’intérêt d’une bonne administration de la justice », la Cour de cassation, plutôt que de renvoyer l’affaire devant une cour d’appel, a statué elle-même au fond. Constatant que la salariée avait, période d’arrêts de travail incluse, 2 ans et 10 mois d’ancienneté, la haute juridiction rappelle qu’elle pouvait prétendre entre 0,5 mois (pour une entreprise de moins de 11 salariés) et 3,5 mois de salaire brut en vertu de l’article L1235-3 du code du travail (si la salariée avait eu 2 mois d’ancienneté supplémentaire, elle eût pu prétendre à une fourchette haute de 4 mois de salaire, telle que prévue pour les anciennetés de 3 ans). La rémunération brute mensuelle de la salariée étant de 1.711,41 €, la Cour de cassation a fixé l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 5.989 € (soit 3,5 mois de salaire brut).
Les périodes d’absence pour maladie avaient déjà été prises en compte pour la fixation du montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse auparavant par la Cour de cassation avant l’entrée en vigueur du barème dit Macron (Cass. soc., 23 sept. 2015, 14-24946 ; Cass. soc., 7 déc. 2011, 10-14156).
En revanche, « la période de suspension n’entre pas en compte pour la détermination de la durée d’ancienneté exigée pour bénéficier » de l’indemnité de licenciement (art. L1234-11 al. 2 c. trav.) sauf dispositions conventionnelles plus favorables (Cass. soc., 27 avr. 2017, 16-13654 ; Cass. soc., 10 déc. 2002, 00-46542 ; Cass. soc., 10 févr. 1999, 95-43561).