Nouvelles précisions sur l’action du Ministre de l’économie …

Pratiques restrictives de concurrence

En 2004, le Ministre de l’économie a assigné devant le Tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon la société Soredis, distributeur exploitant des points de vente sous enseigne Hyper U, sur le fondement de l’article L.442-6-III du Code de commerce. Le Ministre reprochait au distributeur certaines pratiques restrictives de concurrence, et notamment d’avoir obtenu, ou tenté d’obtenir de la part de fournisseurs des avantages ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Le Ministre n’avait pas informé les fournisseurs concernés de son action. 

Par jugement du 14 mars 2006, le Tribunal de commerce a débouté le Ministre, estimant ses demandes mal fondées. Le Ministre a interjeté appel le 19 juin 2006. Il a informé les fournisseurs de son action au cours de l’instance d’appel.

La Cour d’appel de Poitiers, dans son arrêt du 29 janvier 2013, a considéré que la décision du Conseil constitutionnel du 13 mai 2011 (rendu suite à une question prioritaire de constitutionnalité, voir la Lettre Economique n° 113) n’imposait pas au Ministre d’informer les fournisseurs de son action préalablement à l’introduction de ladite action. Elle note que l’objet de cette information était de permettre aux fournisseurs le souhaitant d’intervenir volontairement à l’instance, pour appuyer les demandes du Ministre ou former des demandes différentes. Or, les règles de procédure civile ne permettent pas de formuler lors d’une intervention volontaire en appel des demandes n’ayant pas été présentées en première instance.

La Cour a donc retenu que l’information des fournisseurs par le Ministre durant la procédure d’appel ne leur permettait pas de former des demandes distinctes de celles du Ministre, et a déclaré irrecevables les demandes du Ministre tendant à l’annulation des conventions litigieuses et à la répétition de l’indu. En revanche, elle a déclaré recevable la demande tendant au prononcé d’une amende civile à l’encontre du distributeur, car le Conseil constitutionnel n’avait pas considéré qu’une telle demande nécessitait une information des fournisseurs concernés.

Sur le fond, deux points sont principalement à retenir :
– la Cour a considéré que la participation d’un fournisseur, à hauteur de 15% du chiffre d’affaires réalisé avec le distributeur, à diverses actions promotionnelles dans le cadre d’une opération globale « anniversaire », était disproportionnée par rapport au service rendu si les produits du fournisseur n’étaient pas mis en avant par lesdites actions promotionnelles, mais était licite si les produits bénéficient d’une action promotionnelle spécifique ;
– la Cour a retenu qu’une remise de progression de chiffre d’affaires constituait un avantage ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu, et était donc illicite.

Elle a condamné le distributeur au paiement d’une amende civile de 60 000 euros.

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