L’atteinte à l’image de marque et à la notoriété d’une société constitue un acte de concurrence déloyale

Cass Com 15 novembre 2011

Si l’arrêt rendu le 15 novembre 2011 est l’occasion pour la Cour de revenir sur les conditions d’exercice de l’action pour actes de parasitisme, elle élargit également les critères sanctionnant des actes de concurrence déloyale à l’encontre de produits commercialisés par des sociétés de renommée, selon une terminologie qui n’est pas sans rappeler les décisions rendues en matière de marque. Ainsi, indépendamment d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle, la seule évocation auprès du public du produit d’un tiers, si elle est de nature à porter atteinte à l’image de marque ou à la notoriété de ce tiers, constitue un acte de concurrence déloyale.


Il convient de rappeler que traditionnellement, la jurisprudence sanctionnait sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, le comportement d’un opérateur économique consistant à imiter les éléments caractéristiques mais non protégeables du produit d’un tiers.

Depuis une dizaine d’années, les décisions de la Cour de cassation ont néanmoins démontré néanmoins une évolution importante des notions de concurrence déloyale et de parasitisme, en privilégiant la liberté du commerce et de l’industrie. Ainsi, le fait de copier la prestation d’autrui ne constitue pas en tant que tel un acte de concurrence déloyale fautif, le principe étant qu’une prestation qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle peut librement être reproduite en vertu du principe de la liberté du commerce et de la concurrence.

Il appartient donc à celui qui invoque un comportement fautif de la part d’un tiers de caractériser la faute consistant à créer un risque de confusion dans l’esprit du public, la Cour de cassation ayant en outre jugé que la reprise d’un élément non protégé par un droit privatif ne peut être tenue pour fautive, même si elle est susceptible de procurer une économie pour celui qui la pratique.

Dans chaque cas d’espèce, la reprise d’une combinaison d’éléments spécifiques doit donc être caractérisée  pour démontrer, soit la volonté de créer un risque de confusion, soit celle de profiter de la notoriété du produit antérieur.

L’arrêt rendu le 15 novembre 2011 revient sur la condition relative au risque de confusion. Comme en matière de marque, la Cour considère, en dehors de tout risque de confusion, que l’atteinte peut résulter du lien ou de l’association que le public pourra effectuer entre le produit connu et son imitation portant atteinte à l’image de la société.

Dans cette affaire, la cour d’appel avait rejeté l’action en concurrence déloyale et pour actes de parasitisme de la société Marc Jacobs à l’encontre de trois sociétés ayant fabriqué et commercialisé un sac que la société Marc Jacobs considérait comme reproduisant servilement les caractéristiques de l’un de ses modèles, commercialisé depuis l’année 2000.

Relevant la situation de concurrence entre les parties, la Cour d’Appel avait rejeté la demande fondée sur les actes de parasitisme applicable selon elle uniquement en l’absence de toute situation de concurrence.

La société Marc Jacobs avait également été déboutée de sa demande fondée sur la concurrence déloyale au motif que l’apparence d’ensemble des deux produits en cause excluait tout risque de confusion dans l’esprit de la clientèle notamment au regard de la qualité des produits, de leur prix (29,90 euros après réduction pour les sociétés défenderesses et 750 euros pour le sac vendu par Marc Jacobs), mais également en raison des conditions de vente (la dénomination du défendeur sur les produits litigieux était apposée en caractères apparents et le sac litigieux était vendu dans des bacs alors que le sac Marc Jacobs était offert à la vente sur un présentoir, comme pour tout produit de luxe).

La Cour de cassation sanctionne l’arrêt d’appel et rappelle que l’action fondée sur le parasitisme ou la concurrence parasitaire n’est pas subordonnée à une absence de situation de concurrence. Par ailleurs, s’agissant d’actes de concurrence déloyale, les juges du fond doivent rechercher si indépendamment d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle, l’imitation litigieuse n’évoque pas dans l’esprit du public le produit imité connu, portant ainsi atteinte à l’image de marque ou à la notoriété de la société le commercialisant.

Florence DAUVERGNE

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