La faute civile de propagande en faveur des produits du tabac peut (aussi) être commise par un journaliste

CA Versailles, 9ème Ch. correctionnelle, 28 avril 2017

L’interdiction énoncée par le Code de la santé publique de faire la « propagande ou la publicité, directe ou indirecte » en faveur du tabac et des produits du tabac (ancien article L.3511-3 du Code de la santé publique, désormais article L.3512-4 du Code de la santé publique) peut s’appliquer indifféremment à un article journalistique ou à une publicité commerciale.

En l’espèce, le magazine Voici avait consacré un article sur la relation d’une animatrice de télévision et de son compagnon. Cet article était illustré d’une photographie de l’animatrice et son compagnon, fumant une cigarette. Le journaliste avait assorti la photographie du commentaire suivant « (…) elle est comme ça (…) entière et passionnée. Elle aime les mecs, les vrais. Pas ceux qui vapotent… ».

Cité par l’association Les Droits des Fumeurs, le directeur de la publication du magazine avait été relaxé en première instance par le Tribunal correctionnel de Versailles. Ce dernier demandait donc la confirmation de ce jugement, et soutenait devant la juridiction d’appel que cet article ne pouvait constituer une propagande ou une publicité directe ou indirecte en faveur des produits du tabac, puisqu’il s’agissait d’une « page rédactionnelle, rédigée librement par un journaliste ». Le prévenu invoquait au soutien de son argumentation l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et la liberté d’expression journalistique.

Contrairement au jugement de première instance, la Cour d’appel de Versailles a jugé que les dispositions du Code de la santé publique prohibant la propagande en faveur des produits du tabac, « ne procédant pas à une distinction entre espace rédactionnel et espace publicitaire », peuvent également s’appliquer à un article de presse. Cette atteinte à la liberté d’expression est, selon la Cour, proportionnée à la poursuite de l’objectif recherché, qui est la protection de la santé.

En l’espèce, la Cour estime qu’une faute civile a bien été commise, l’article litigieux valorisant « le fait de fumer une cigarette en l’associant à la virilité », à l’inverse de l’acte de vapoter, « présenté de manière dévalorisante en l’associant à un demi engagement ».

Le Directeur de la publication a ainsi été condamné à payer la somme de 3.000 euros à l’association Les Droits des Fumeurs.

Antoine JACQUEMART

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