Grossiste et services fictifs de coopération commerciale

Un grossiste en fruits et légumes, qui revend ses produits notamment sur un Marché d’Intérêt National (MIN) à Marseille, avait conclu en 2011 avec plusieurs fournisseurs des contrats prévoyant à sa charge une obligation de mettre en avant les produits des fournisseurs. Cette mise en avant devait se faire (i) sur le lieu de vente, au moyen d’une présentation des produits dans un espace réservé, soigné et identifié, permettant leur valorisation et leur individualisation par rapport aux autres produits et (ii) sur le site internet du grossiste, dans un encart privilégié.

Suite à plusieurs contrôles de la DGCCRF au MIN de Marseille, le Ministre a engagé une action sur le fondement de l’article L.442-6-I-1° du Code de commerce, qui interdit le fait d’obtenir ou de tenter d’obtenir d’un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu.

Dans un arrêt du 15 janvier 2015, la Cour d’appel de Paris, précisant qu’il appartenait au distributeur d’apporter la preuve de la réalisation du service, a considéré que les services de mise en avant n’avaient pas été rendus, en tout cas pas conformément aux contrats conclus.

En effet, sur le lieu de vente, le grossiste s’était contenté de disposer au premier rang de son espace de vente les palettes de produits des fournisseurs concernés, sans véritable espace réservé, soigné et identifié. Au surplus, le grossiste avait reconnu qu’aucun aménagement particulier des locaux du MIN n’avait été effectué et qu’une adaptation des lieux était techniquement impossible.

Quant au site internet, le grossiste a reconnu ne pas avoir mis en place les encarts privilégiés prévus aux contrats.

La Cour a, par ailleurs, relevé que la mise en place des services de mise en avant avait été concomitante à l’adoption de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ayant prohibé l’application de remises, rabais et ristournes (RRR) pour l’achat de fruits et légumes frais, ce qui laissait supposer que les services avaient pour but de venir compenser la perte pour le grossiste des RRR dont il bénéficiait précédemment.

Le grossiste a donc été condamné à la répétition de l’indu et au paiement d’une amende civile de 80 000 euros (que la Cour a justifié par le chiffre d’affaires de 85 millions d’euros réalisé par le groupe du grossiste). Par ailleurs, la clause des contrats relative aux services de mise en avant a été déclarée nulle.

Cour d’appel de Paris, 15 janvier 2015, RG n° 13/03832