Comment articuler une Unité Economique et Sociale (UES) existante avec la mise en place d’un CSE ?

(Cass. Soc. 25 mars 2020, 18-18.401)

Dans une décision inédite, la Cour de cassation s’est penchée sur le sort des accords d’entreprise reconnaissant l’existence d’une UES depuis la suppression des anciennes institutions représentatives du personnel (Comité d’entreprise, CHSCT et délégués du personnel) et l’obligation pour les entreprises de mettre en place un Comité Social et Economique (CSE) au 31 décembre 2019 au plus tard.

Conformément à une définition jurisprudentielle, une UES existe lorsqu’est caractérisée entre des entités juridiquement distinctes, une concentration des pouvoirs de direction, une similarité ou une complémentarité des activités déployées par ces différentes entités, l’existence d’une communauté de travailleurs résultant de leur statut social et de conditions de travail similaires pouvant se traduire en pratique par une certaine mutabilité des salariés.

L’UES est établie soit par décision de justice, soit par un accord collectif.

Les accords collectifs établissant l’UES se décomposent en règle générale en deux parties : une définition du périmètre de l’UES déterminant les entités concernées et une seconde partie spécifiant le cadre des élections professionnelles et, notamment, le nombre de comités d’établissement, l’existence, l’éventuelle existence d’un comité d’entreprise unique, etc..

Dès lors qu’en application de l’ordonnance du 22 septembre 2017, l’ensemble des institutions représentatives du personnel est supprimé et remplacé par le CSE, que deviennent les accords collectifs instituant une UES ? Sont-ils caducs par l’effet de la loi ou survivent-t-ils ?

La Cour de cassation y a répondu à l’occasion d’un cas d’espèce particulier :

En 2005, un accord d’UES est conclu entre trois entreprises et est renouvelé en 2010. Les partenaires sociaux précisent que l’accord ne peut faire l’objet d’aucune dénonciation avant son échéance fixée au 23 juillet 2020.

En 2018, l’une des entreprises composant l’UES informe les partenaires sociaux qu’elle va mettre en place un CSE. Les partenaires sociaux sont réunis et un accord préélectoral est conclu aux termes duquel les élections sont organisées le 19 février 2018.

Le 1er mars 2018, une organisation syndicale représentative dans l’UES saisit le tribunal d’instance d’une action en nullité des élections professionnelles.

Selon l’organisation syndicale, les élections professionnelles devaient se tenir dans le périmètre défini par l’accord UES de 2010 lequel prévaut sur le protocole préélectoral.

Le tribunal d’instance déboute l’organisation syndicale considérant qu’elle aurait dû saisir la DIRECCTE sur le fondement de l’article L 2313-5 et que sa requête était donc irrecevable.

Un pourvoi est formé, permettant à la Cour de cassation de se prononcer pour la première fois sur l’articulation entre un accord UES et la mise en place d’un CSE.

La Cour de cassation adopte une solution à deux niveaux :

Elle estime que les dispositions d’un accord UES déterminant le périmètre des établissements distincts pour les élections professionnelles sont caduques. Elles cessent de produire effet à compter du premier tour des élections instituant le CSE.

La Haute cour juge que les dispositions d’un accord UES ne portant pas sur le périmètre des établissements distincts pour les élections professionnelles demeurent applicables.

En revanche, elle estime que les dispositions d’un accord UES déterminant le périmètre des établissements distincts pour les élections professionnelles sont caduques. Elles cessent de produire effet à compter du premier tour des élections instituant le CSE.

Elle en déduit que toutes les entreprises y compris celles couvertes par un accord UES, sont soumises aux dispositions des articles L 2313-5 et R 2313-4 et suivants du Code du travail. Le périmètre des élections professionnelles doit être établi conformément à ces dispositions et toute contestation doit être portée, dans un délai de 15 jours, devant la DIRECCTE