Bons d’achats offerts par le Comité d’Entreprise aux salariés

Cass. 2e civ., 12 février 2015, n°13-27267

Bons d’achat offerts par le Comité d’Entreprise aux salariés : l’employeur ne peut bénéficier des exonérations de charges sur les bons d’achats que s’il justifie d’une délégation expresse du Comité d’entreprise


Offrir des bons d’achat aux salariés constitue l’une des prestations les plus usuelles du Comité d’entreprise dans le cadre de ses activités sociales et culturelles ou ASC.

Cette prestation en nature est exonérée de cotisations sociales et patronales sous certaines conditions.

L’Urssaf a fixé deux seuils : Un premier seuil fixé pour 2015 à 158,50 euros par salarié,

Si ce premier seuil est dépassé, il est tout de même possible de faire bénéficier les salariés d’un ou plusieurs bons d’achat, si les trois conditions suivantes sont remplies :

  • Le bon d’achat doit être remis à l’occasion d’un évènement concernant le salarié (naissance d’un enfant, retraite, fêtes des mères, etc.),
  • Avoir une utilisation déterminée (par exemple un bon d’achat rentrée scolaire remis en décembre sera considéré comme un avantage soumis à cotisations sociales),
  • Etre d’un montant conforme aux usages : concrètement le bon ne doit pas excéder 5% du plafond mensuel de la sécurité sociale, soit 158,50 euros pour 2015.

L’article R 2323-21 du Code du Travail prévoit que le CE qui dispose du monopole de gestion des activités sociales et culturelles peut déléguer cette gestion à des personnes qu’il désigne.

En pratique, il est fréquent que l’employeur gère directement (voire se substitue à un CE), certaines activités sociales et culturelles (bons d’achat, restaurant d’entreprise, etc.) en imputant ensuite cette prise en charge directe sur la contribution versée au budget des ASC.

La doctrine considérait qu’il s’agissait d’une situation de fait et que l’employeur agissait sur la base d’un mandat implicite ou tacite de gestion que le CE pouvait, compte tenu du monopole de gestion, révoquer à tout moment. La jurisprudence avait, notamment, admis la théorie du mandat implicite de gestion, dans le calcul du budget des ASC (cf. cass soc 30 mars 2010, n°09-12074).

C’est ce moyen de droit que soulevait l’employeur dans l’arrêt rendu le 12 février 2015 et aux termes duquel il contestait un redressement de cotisations sociales sur des bons d’achat remis aux salariés au nom du CE, mais gérés par l’employeur.

La Cour de cassation (2e chambre civile) a validé l’argumentation de la cour d’appel qui considérait sur la base de l’article R 2323-21 du Code du travail que confier la gestion d’une ASC implique une « désignation », c’est-à-dire un acte positif.

Elle écarte donc toute notion de mandat tacite ou implicite.

En agissant pour le compte du CE, mais sans délégation écrite, l’employeur ne peut bénéficier de l’exonération de cotisations sociales propres aux bons d’achat.

Si le principe posé semble clair demeurent deux zones d’ombres :

Quelle forme devra prendre la délégation expresse : un mandat écrit au sens de l’article 1984 du Code civil ou une simple mention dans un procès-verbal des réunions du CE qui selon la formule consacrée fait foi jusqu’à preuve contraire des discussions et décisions du comité (cass soc 1er avril 1997, n°95-41159) ?

Enfin, cette décision n’éclaircit pas totalement les conditions dans lesquelles l’employeur condamné aux rappels de cotisations sociales pourra en obtenir le remboursement par le CE. En effet, conformément aux règles posées par la jurisprudence, l’employeur est le seul débiteur légal des cotisations sociales et un redressement notifié au CE serait irrégulier.

La jurisprudence (cass soc 9 juin 1992, n°89-18540) admet que l’employeur soit en droit de réclamer le remboursement des cotisations payées lorsque le redressement a porté sur une prestation qui n’entrait pas dans la catégorie des activités sociales et culturelles (ex : une bourse d’études). A l’inverse, l’employeur peut-il réclamer le remboursement lorsqu’il porte sur les bons d’achat et que la prestation entre sans aucun doute possible dans la catégorie des activités sociales et culturelles ? La jurisprudence n’a pas expressément tranché ce type d’hypothèse et la doctrine semble pencher pour une réponse négative.

Khalil MIHOUBI

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